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il aura marqué une trace, par ses travaux et par son enseignement, auteur, en un autre genre, de deux charmans et piquans volumes sur la Jeunesse de Cavour; M. Ivanoe Bonomi, professeur, lui aussi, et publiciste distingué, MM. Sacchi et Luigi Fera, M. Filippo Meda, dont la participation au pouvoir fera date en ce qu’elle consacre et enregistre pour l’avenir la participation des catholiques à la vie politique du royaume. Au point de vue de leur classification parlementaire, les dix-neuf ministres auxquels se sont adjoints ou vont s’adjoindre, en nombre à peu près égal, des sous-secrétaires d’État, se répartissent de la sorte : douze libéraux de toute nuance, et de droite ou de gauche, deux radicaux, deux giolittiens, deux socialistes réformistes, un catholique. C’est bien un ministère national, puisque tous les partis, — à l’unique exception des socialistes officiels, qui s’en sont eux-mêmes exclus en se séparant de la nation, — y ont au moins un représentant; et c’est encore un ministère national, parce que toutes les régions y figurent au moins par un de leurs fils ou de leurs élus, condition tacite de la formation d’un Cabinet durable dans l’Italie depuis un demi-siècle unifiée, mais divisée pendant des siècles. M. Boselli, d’origine figure, représente une circonscription piémontaise; M. Ruffini vient de Turin; M. Meda, de Milan; M. Carcano, de Côme ; M. Raineri, de Plaisance; M. Bissolati est de Crémone; M. Sonnino est Toscan ; l’amiral Corsi est Romain: M. Bonomi, avant d’être député, a été conseiller municipal et assesseur ou adjoint de la ville de Rome; M. Comandini est Romagnol ; le général Morrone et M. Arlotta sont Napolitains; M. Colosimo est Calabrais, comme M. Luigi Fera; M. Orlando est Sicilien. La crise ouverte par la chute du ministère Salandra a donc été parfaitement résolue en ses raisons mêmes, ou en ses motifs, ou en ses prétextes. On a dit de cette crise qu’elle remontait au mois de janvier ou de février, que M. Salandra l’avait rendue inévitable quand, dans son discours de Turin, il avait hautement fait entendre que son ministère resterait jusqu’au bout ce qu’il était, conservateur et libéral, qu’il vivrait et qu’il mourrait dans la même doctrine et avec les mêmes hommes. Ce n’est pas encore assez dire. Dès le mois de novembre ou de décembre 1915, des menées que nous nous refusons le droit de qualifier d’intrigues, le minaient et le rongeaient déjà, et il allait ou il traînait, se dépouillant chaque jour de sa substance, quels que fussent ses mérites et ses services. Qu’est-ce qu’on lui reprochait alors ? Une seule chose, qui revenait dans toutes les conversations ; nous l’avons cent fois entendue là-bas et nous l’avons dix fois répétée ici : une certaine mollesse, una certa fiacchezza.