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intérieure, au sens vulgaire du terme, mais bien d’une question plus large et plus haute, de plus de conséquence aussi, relative à l’organisation des pouvoirs publics, face à l’ennemi, en pays envahi, au bout de la deuxième année de guerre ? Une telle question a des aspects historiques et théoriques qui permettent de négliger les autres et d’en aborder le fond sans atteindre, ni viser, ni nommer personne. En la prenant par son meilleur côté, c’est réellement un problème de grande politique, qu’il serait à la fois plus convenable et plus aisé d’étudier dans la chaire qu’à la tribune. Le danger vient de ce qu’il est tout ensemble abstrait et concret, et de ce que la solution qui lui sera donnée en doctrine pourrait, en pratique, nous conduire très loin, quelles qu’aient été d’ailleurs la loyauté des intentions, l’honnêteté et même la sévérité des précautions.

Commençons par poser le fait dans une exacte procédure parlementaire. Par une « proposition de résolution, » la Chambre est appelée à « nommer une « délégation directe chargée du contrôle effectif et sur place aux armées de la République. » La mission de contrôle des délégués serait « permanente et générale. » Elle ne comporterait « aucune intervention dans les ordres relatifs aux opérations militaires. » Le Gouvernement serait « invité à faire assurer aux délégués, par l’autorité militaire..., le libre et complet exercice de leur mandat, ainsi que toutes les facilités nécessaires à son exécution. » Quant à l’exposé des motifs sur lesquels s’appuierait la résolution, il est réduit à peu près à ce motif unique : « donner force exécutoire » à l’ordre du jour voté par la Chambre, le 22 juin, pour clore son comité secret. La proposition de résolution, liée étroitement à l’ordre du jour, comme une seconde partie ou une conclusion, en sera donc la traduction, valant ce qu’elle vaut, en un acte, sinon législatif, — c’est une simple proposition de résolution qui ne saurait, dans son effet le plus plein, engager que la Chambre elle-même, — pourtant quasi législatif, — c’est un vœu d’assemblée souveraine que le Gouvernement ne saurait, au moindre risque, écarter sans conflit.

Un des auteurs de l’ordre du jour l’a demandé : est-ce une traduction fidèle ? et il a répondu que non. Les deux textes, placés en regard l’un de l’autre, vont tout de suite faire apparaître les différences. L’ordre du jour du 22 juin disait: « Tout en s’abstenant strictement d’intervenir dans la conception, la direction ou l’exécution des opérations militaires...» La proposition de résolution traduit : « La mission de contrôle... ne comporte aucune intervention dans les ordres relatifs aux opérations militaires. » L’ordre du jour du 22 juin