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le Moniteur, je n’ai pu t’en envoyer copie. J’ai été bien affectée de la mort de tant de braves et surtout de celle du général Corbineau, un de mes écuyers ; je suis sûre que tu regretteras aussi le général Dalhmann, commandant tes chasseurs. Tout cela est bien triste, et ce qu’il y a de plus affreux, c’est la manière dont l’Empereur s’est exposé. Des lettres particulières disent que les boulets tombaient à ses côtés. Pense que toute l’armée russe était là et que l’Empereur avait sept divisions qui étaient à deux journées en arrière. Adieu, mon cher Eugène, ma santé est assez bonne, mais mon cœur est bien triste de la longue absence de l’Empereur. Ne te sépare jamais d’Auguste, cela fait trop de mal. Dis mille choses aimables à ma chère fille. Je t’aime et je t’embrasse tendrement.

« JOSEPHINE. »


Les questions de cérémonial ont pris, ainsi qu’on a vu, même de fils à mère, une importance considérable, mais combien plus si l’on est en public.

On sait que le 3 germinal an XIII (24 mars 1805), à trois heures de l’après-midi, le Pape avait baptisé en grande pompe à Saint-Cloud le prince Louis-Napoléon, second fils du prince Louis et de la princesse Hortense[1]. On avait ici raffiné sur le cérémonial et l’on avait mis en jeu l’étiquette des Bourbons tout entière. C’est ce cérémonial que Joséphine envoie à Eugène pour qu’il soit observé à Milan, lorsque l’enfant si fort attendu sera né et pourvu qu’il soit un garçon.


Paris, ce 12 mars (1807).

« Je t’envoie, mon cher Eugène, le procès-verbal de la cérémonie du baptême du fils cadet de la reine de Hollande. Comme celui de ton enfant ne sera peut-être pas célébré par le Pape, il y aura quelque différence, mais peu embarrassante parce qu’elle tiendra aux usages de l’Eglise, que les cardinaux doivent connaître. Au reste, mon avis est que tu ne fasses pas baptiser ton enfant avant d’avoir reçu les intentions de l’Empereur ; tu pourras le faire ondoyer. J’attends avec impatience le courrier qui m’apprendra sa naissance. Je reçois des lettres de l’Empereur ; sa santé est toujours bonne, mais je suis bien triste

  1. Cf. Napoléon et sa famille, III, 77.