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terre. Il suffit de rappeler qu’une politique prévoyante lui a toujours fait maintenir une flotte de guerre égale à celle de deux autres nations quelconques, quelle que fût d’ailleurs leur puissance navale. Grâce à ce système qu’on a appelé le two powers standard (l’étalon des deux puissances), elle a conservé la maîtrise des mers pour elle et ses alliés. La seconde raison est que le Royaume-Uni est le pays du monde où les fonctionnaires civils et militaires sont le mieux payés : nulle part les soldats ne reçoivent en nature et en argent des allocations comparables à celles qui leur sont fournies par le War Office (ministère de la Guerre). Enfin, dès les premiers jours de la lutte gigantesque, nos voisins se sont déclarés prêts à venir financièrement en aide à leurs alliés. Ils ont avancé des sommes considérables à la Belgique, à la Serbie, à la Roumanie, et facilité des opérations de trésorerie à la Russie, la France et l’Italie. D’après une communication récente, le total de ces avances atteindra bientôt 800 millions de livres sterling. La livre sterling, unité monétaire anglaise, contient un poids d’or correspondant à 25 francs 20 de monnaie française. Par suite des paiemens incessans que nous avons à faire à Londres, le prix de la livre sterling, à Paris, s’est élevé un moment au-delà de 28 francs. Il est encore aujourd’hui aux environs de 27 francs 80. Les prêts aux alliés constituent une source de dépense qui s’est ajoutée aux autres et qui achève d’expliquer pourquoi les débours journaliers de l’Angleterre oscillent entre 5 et 6 millions de livres sterling, c’est-à-dire, au change actuel, de 140 à 170 millions de francs environ. De pareils chiffres sont vertigineux et auraient paru invraisemblables avant que le conflit mondial éclatât.

Pour se procurer les ressources nécessaires, le Trésor anglais, qu’on désigne en général du nom d’Echiquier, a eu recours à des procédés semblables à ceux qui ont été pratiqués en France, avec deux différences notables toutefois, dont la seconde a d’ailleurs été une conséquence de la première. Il ne s’est pas adressé à la Banque d’Angleterre et ne lui a demandé aucune avance permanente : cet établissement a continué à escomptere. Comme en temps ordinaire, certains Bons à courte échéance que le gouvernement est amené à lui présenter au cours de l’exercice budgétaire. Ces opérations portent sur des chiffres plus faibles que ceux du prêt fait par la Banque de France