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japonais observaient du haut d’une crête ou d’un arbre et communiquaient (parfois par téléphone) avec leurs batteries. — Le tir rapide des pièces n’a guère pu être utilisé à cause de l’insuffisance des munitions réglementaires. L’artillerie a souvent empêché les réserves d’approcher en rendant infranchissables des zones de terrain étendues[1]. — Quand leurs pièces étaient bombardées, les servans se terraient et le tir était suspendu, de sorte que la lutte d’artillerie fut rarement simultanée (c’est la même chose qui s’est produite dans la guerre actuelle). — La nécessité d’une artillerie plus puissante que l’artillerie de campagne s’est manifestée dès le début contre les retranchemens. Le général de Négrier écrit à ce sujet : « L’artillerie de gros calibre, comme le mortier sont maintenant indispensables aux armées de campagne. Il faut prendre son parti de cette nécessité. Il en est de même des mitrailleuses. Elles sont d’un emploi constant, car elles permettent de tenir solidement des espaces étendus avec peu de monde. » L’organisation des tranchées précédées de défenses accessoires, surtout de réseaux de fils de fer, l’attaque par vagues d’assaut successives, en profitant des couverts et des abris et cheminemens, l’importance de tout cela a été clairement aperçue et indiquée par l’éminent écrivain. « Dans l’offensive, l’outil de pionnier est devenu indispensable à chaque fantassin. » — Enfin, le général de Négrier signalait l’emploi du bouclier d’infanterie employé pour protéger les hommes chargés de couper les fils de fer.

Comme conclusion, il recommandait instamment : la constitution d’une artillerie lourde de campagne, et de très gros approvisionnemens en munitions ; l’emploi de matériel téléphonique pour permettre le tir indirect des batteries, et de projecteurs en grand nombre ; l’emploi d’usines frigorifiques pour la conservation des denrées, et d’un réseau ferré à voie étroite étendu pour le ravitaillement.

Toutes ces suggestions du remarquable homme de guerre qu’était le général de Négrier, fruit d’une expérience attentive, servie par un jugement clair, n’ont pas rencontré auprès de l’administration l’accueil qu’elles auraient mérité. Elles se sont cependant toutes trouvées exactement vérifiées dans la guerre actuelle, à l’exception d’un détail : le général de Négrier assure que les shrapnells se sont montrés plus efficaces contre les tranchées que l’obus explosif. Le contraire s’est manifestement produit dans la guerre actuelle, ce

  1. C’est en somme le tir de barrage actuel.