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Mirabeau, on a retrouvé les notes d’un discours, préparé sans doute au début de 1791 et dans lequel il réclamait pour les prêtres la liberté de se marier. Ce n’était qu’un canevas rédigé par un secrétaire et qui n’était suivi d’aucun projet de décret. Mirabeau au surplus, en entrant dans cette voie, était-il sincère ? On peut suspecter sa bonne foi ; car, vers la même époque, en un mémoire destiné à la Cour, il conseillait que le gouvernement de Louis XVI travaillât à introduire dans l’ordre du jour de la représentation nationale certains débats irritans qui discréditeraient la Révolution. Or, parmi ces débats, il y avait celui du mariage des prêtres. — Sur cette question, l’Assemblée constituante n’eut à émettre aucun vote ; mais son comité ecclésiastique eut l’occasion de témoigner son sentiment. Le 10 août 1791, il fut consulté en ces termes par le curé constitutionnel de la paroisse Saint-Paul : « Un prêtre, mandait-il, veut se marier et vient de m’apporter ses bans à publier… Le cas est nouveau… Quel parti prendre ? Dois-je publier les bans ? Après la publication, dois-je procéder au mariage ? » Le comité, par l’organe de son président qui était Lanjuinais, répondit aussitôt : « M. le curé de Saint-Paul a le droit et le devoir de refuser son ministère pour le mariage dont il s’agit… La loi qui rend indivisible pour les catholiques le sacrement et le contrat de mariage est incompatible avec le mariage des prêtres et n’est point abolie. »

En dépit des interprétations législatives, plusieurs dans le clergé avaient hâte de secouer le lien importun. Leur plus grand embarras était celui de la procédure à suivre : s’ils se tournaient vers l’autorité ecclésiastique, ils avaient peu de chances de trouver un confrère assez hardi, assez dégagé des règles traditionnelles pour recevoir leur consentement et en dresser l’acte : s’ils s’adressaient à l’autorité séculière, l’obstacle n’était guère moindre ; car aucune loi n’avait encore confié aux magistrats communaux la charge de constater l’état civil des citoyens. Dans ces conjonctures, l’abbé Cournand, en une lettre du 23 septembre 1791, fit appel à M. Cahier de Gerville, substitut du procureur de la commune, qu’on savait fort exempt de préjugés, lui exposa sa perplexité, le supplia de se montrer secourable. Puis, sans attendre sa réponse, il se présenta le lendemain au secrétariat de la municipalité de Paris. Rien n’était fixé sur les formes ; car on escomptait une loi future, encore à