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L’ÉPOPÉE SERBE
DANS
SES CHANTS HÉROÏQUES[1]

I
LA TRIADE SLAVE ET LA BATAILLE DE KOSSOVO


I. — LA TRIADE SLAVE : RUSSIE, POLOGNE ET SERBIE

Un des phénomènes les plus frappans de la guerre actuelle est la métamorphose de l’âme des nations en lutte qui s’opère sous nos yeux avec une rapidité vertigineuse. Cette métamorphose n’est au fond que la manifestation de leur plus intime nature, mais elle se réalise avec une spontanéité si subite qu’elle revêt l’éclat d’un météore et nous effraye ou nous ravit comme un miracle. Des anciennes nations d’Europe qui se sont jetées dans la mêlée sanglante, Allemagne, France, Angleterre, Italie, chacune a sorti sa devise, barbare ou chevaleresque, justicière ou héroïque, pour la brandir dans le combat comme un drapeau. Et nous nous sommes écrié : « Voilà son vrai visage et sa pensée de toujours. Mais maintenant elle se connaît mieux, elle s’affirme tout entière. Sous le coup de foudre d’un péril mortel, elle a fait sa synthèse. »

Il n’en est pas de même de la grande race slave, qui est entrée dans la lice comme le plus jeune et non le moins puissant des champions du droit nouveau des peuples. Roulant sa masse énorme entre les hauts plateaux de l’Asie et de l’Europe, de

  1. Copyright by Édouard Schuré, 1917.