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des hommes dont l’Empereur pourrait désirer la venue. La situation politique conspire autant contre l’Empereur que l’éloignement, la mauvaise réputation du climat, la crainte des restrictions, le récit des privations imposées aux captifs, et puis Mme de Montholon est très surveillée ; elle a dû résider assez longtemps à Bruxelles ; elle ne se meut dans Paris que sous l’œil des policiers, elle doit prendre les eaux, voyager pour ses affaires, négocier avec les créanciers de son mari. Tout cela fait bien des choses.

D’ailleurs, n’y a-t-il point une accalmie ? Des hôtes nouveaux n’ont-ils pas dû, en débarquant à Sainte-Hélène le 20 septembre 1819, apporter à l’Empereur une consolation morale et un soulagement physique ? A Longwood, Montholon parait si bien le penser qu’il n’attend pour partir que leur arrivée. Chacune des lettres qu’il écrit à sa femme témoigne de son impatience. Comment ceux qui vont venir, choisis, triés par l’oncle du captif, par le cardinal Feschqui a réclamé avec impétuosité, au nom de sa sœur et au sien, le droit exclusif de les désigner, ne réaliseraient-ils pas ce que l’Empereur peut désirer ?

A Rome, le cardinal, en sa qualité de membre du Sacré-Collège, a naturellement assumé un rôle prépondérant ; seul de la Famille, il est qualifié pour s’adresser au Pape et, seul des souverains d’Europe, le Pape a témoigné aux Bonaparte une bienveillance qui n’a pas été sans le compromettre gravement aux yeux de M. de Blacas, ambassadeur du Roi Très-Chrétien. Déjà, au mois de septembre 1817, Fesch, au nom de Madame qu’ont émue les révélations de Santini, a sollicité de Pie VII son intervention près du Prince régent en vue d’obtenir pour l’Empereur un séjour plus salubre que « le mortifère climat de Sainte-Hélène, » et il n’a pas tenu à Pie VII qu’il ait eu gain de cause. « Nous devons nous souvenir tous les deux, écrit le 6 octobre Sa Sainteté au cardinal secrétaire d’Etat, que, après Dieu, c’est à lui principalement qu’est dû le rétablissement de la religion dans le grand royaume de France. La pieuse et courageuse initiative de 1801 Nous a fait oublier et pardonner dès longtemps les torts subséquens. Savone et Fontainebleau ne sont que des erreurs de l’esprit ou des égaremens de l’ambition humaine ; le Concordat fut un acte chrétiennement et héroïquement sauveur.

« La mère et la famille de Napoléon font appel à Notre