Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 38.djvu/766

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de notre religion. Vous êtes notre évêque[1] ; nous désirons que vous nous en envoyiez un, français ou italien. Veuillez dans ce cas faire choix d’un homme instruit, ayant moins de quarante ans, et surtout d’un caractère doux et qui ne soit pas entêté de principes antigallicans. » Pierron, qui fait fonction de maître d’hôtel, est malade ainsi que le cuisinier. « Il serait donc nécessaire, écrit Bertrand, que vous, ou le prince Eugène, ou l’Impératrice, envoyassiez un maître d’hôtel et un cuisinier français ou italien, de ceux qui ont été au service de l’Empereur ou qui le seraient des membres de sa famille. »

« Je ne veux pas, dit Bertrand en terminant, vous affliger en vous parlant de la santé de l’Empereur qui est peu satisfaisante. Cependant, son état n’a pas empiré depuis les chaleurs. N’ajoutez aucune foi à toutes les fausses relations qu’on peut faire en Europe. Tenez comme règle et comme seule chose vraie que, depuis vingt-deux mois, l’Empereur n’est pas sorti de son appartement, si ce n’est quelquefois et rarement pour venir voir ma femme. Il n’a guère vu personne, si ce n’est deux ou trois Français qui sont ici et l’ambassadeur anglais à la Chine. »

Vers le 20 mai, « M. le cardinal Fesch se rendit chez M. le cardinal Consalvi pour lui dire, écrit l’ambassadeur du Roi, M. de Blacas d’Aulps, que le sieur Napoléon Buonaparte et les personnes détenues avec lui à l’île de Sainte-Hélène s’affligeaient de ne point avoir de prêtre catholique, qu’elles imploraient la protection du Saint-l’ère pour obtenir qu’un ecclésiastique lui fut envoyé et qu’elles suppliaient Sa Sainteté de le demander au gouvernement anglais. » M. de Blacas, dont le cardinal Consalvi avait désiré obtenir d’abord le consentement, répondit qu’il ne prévoyait pas de difficulté de la part des puissances, « si le prêtre que l’on demandait était choisi parmi les ecclésiastiques français qui se trouvent encore en Angleterre » (émigrés et non concordataires), et que Son Eminence pouvait écrire dans ce sens à lord Castlereagh.

Madame, informée de l’accueil qui avait été fait « à la demande de son grand et malheureux proscrit de Sainte-Hélène, remercia aussitôt (27 mai) le cardinal Consalvi ; » à la prière si juste et si chrétienne de l’Empereur, il s’est empressé d’intervenir auprès du gouvernement anglais et de chercher un prêtre

  1. En sa qualité de grand aumônier de France.