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en chef des équipages de la Garde marine. Puis vinrent le corps des Cadets, le corps des Pages, l’École de cavalerie... L’Escorte impériale, composée de Cosaques, est arrivée hier de Tsarskoïé-Sélo, accompagnée d’une partie de ses officiers. C’était une troupe d’élite et dont on croyait la fidélité inébranlable. Elle a fait sensation à la Douma. La cause du Tsar est perdue ; tout le monde l’abandonne peu à peu !...

Les arrestations ont commencé. Le vieux Gorémykine est amené à la Douma sur un camion automobile. Il paraît plongé dans la stupéfaction et l’hébétude. C’est, malgré tout, un spectacle lamentable. Ses longs favoris blancs volant au vent et, à chaque cahot, sa tête branle comme un battant de cloche. Dabravolsky, ancien ministre de la Justice, Chiglavitoff, président du Conseil d’Empire ; Rein, ministre de la Santé publique, tant d’autres encore ont été arrêtés. Le plus haï, Soukhomlinoff, arrive au milieu des huées de la multitude qui le reconnaît. Le bruit court que les anciens ministres ont été arrêtés à l’Amirauté, sauf l’amiral Grégorovitch qui n’a pas quitté son appartement.

M. Milioukoff, leader du parti Cadet (constitutionnel-démocrate), monté sur une chaise, a prononcé, dans la salle Catherine, un magnifique discours, plein de modération.


Les troupes d’Orianenbaum, de Tsarskoïé-Sélo se sont jointes aux troupes révolutionnaires. Tsarskoïé-Sélo est livré à des bandes de pillards. La terreur y règne. Le gouverneur de la ville a demandé des troupes à la Douma pour protéger le palais et les habitans.

Le tsésarévitch, — grand-duc Alexis, — est alité. Sa température est de 39°. Il a la rougeole, mais d’une espèce maligne, et son état est très grave. D’après les bruits qui courent aujourd’hui, l’Impératrice aurait écrit à M. Rodzianko en lui demandant de la recueillir au Palais de Tauride avec ses enfans.

M. Rodzianko s’est adressé à tous les commandans de corps d’armée pour leur annoncer le changement de gouvernement et les prier de haranguer leurs troupes.

M. Karaouloff, membre du gouvernement provisoire, a fait publier qu’ « il est défendu à qui que ce soit d’arrêter, de perquisitionner ou de réquisitionner sans mandat. »

Nouvelle émotion : deux marins se sont présentés chez mon