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d’intransigeans qui cherchent toutes les occasions de faire des manifestations séparatistes et de réveiller l’agitation et les regrets dans le pays. C’est ce groupe rebelle que la cour et le gouvernement danois viennent d’accueillir de façon à ranimer ses espérances et à encourager ses tentatives. C’est un mauvais procédé que nous ne pouvons tolérer. »

Lord Odo Russell essayait d’arrêter ce flux de paroles, de rétablir la vérité. « On a exagéré et dénaturé les faits, objecta-t-il, ils n’ont pas eu le caractère intentionnel sous lequel on vous les a présentés. »

Mais son interlocuteur semblait ne pas entendre et continuait : « N’essayez pas de les excuser. Nous sommes bien informés, et je sais ce que je dis : ils mériteraient une sévère leçon. Nous avions voulu d’abord envoyer ses passeports au ministre de Danemark à Berlin. Mais nous n’irons pas jusque là ; nous nous bornerons pour le moment à retenir ici notre nouvel envoyé à Copenhague ainsi que le personnel de sa légation. Quant aux craintes que vous exprimez pour la sûreté du duc de Cumberland, bien qu’il soit pour nous un prince allemand et non un prince anglais et qu’il nous soit en conséquence loisible de le faire arrêter, vous pouvez rassurer votre gouvernement, mais à une condition, c’est que le duc traversera l’Allemagne sans s’y arrêter. S’il en était autrement, s’il prétendait se rendre en Hanovre comme on lui en prête l’intention, nous n’hésiterions pas à nous saisir de lui et à le conduire à la frontière. Il dépend de sa volonté d’éviter ce désagrément. »

L’ambassadeur attendait cette déclaration ; elle le délivrait d’un gros souci et il s’empressa de télégraphier à son collègue de Copenhague, afin que le duc de Cumberland fût averti des intentions du Cabinet de Berlin et traversât l’Allemagne d’une traite, ce qui fut fait. Il partait pour l’Autriche avec sa femme, le 25 janvier, par Lubeck ; afin d’éviter la traversée des duchés de l’Elbe où la famille royale n’avait plus passé depuis 1864, et, le surlendemain, il arrivait à Vienne sans avoir été en route l’objet d’aucune mesure hostile.

Lord Odo Russell, bien que sur ce point la mission dont l’avait chargé sa cour eût pleinement réussi, n’était qu’à demi rassuré quant aux projets ultérieurs de l’Allemagne. Dans le langage de Bülow, il avait cru trouver la preuve qu’elle ne s’en tiendrait pas là et qu’elle entendait pousser plus loin la