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ERNEST PSICHARI [1]

C’était le petit-fils d’Ernest Renan. « Grec par son père et tout ensemble Français, Latin, Breton par sa mère, en qui sont unis le sang catholique des Renan et le sang protestant des Scheffer, » son cas symbolise avec une force singulière l’aventure spirituelle d’une génération qui, de très bonne heure, sur la plupart des grandes questions, a pris le contre-pied des idées en honneur chez nous il y a un demi-siècle.

Ernest Psichari était né en 1883. Il put connaître son grand-père, et il fut élevé dans le culte de l’auteur de la Vie de Jésus. Cependant quelques autres influences se disputèrent assez vite la direction de sa pensée, « A dix-huit ans, — nous dit son ami M. Henri Massis dans l’excellente biographie qu’il lui a consacrée, — il publiait des vers subtils, à la manière de Verlaine et de Mallarmé qui fut aussi celle d’Ary Renan, son oncle. Par ailleurs, épris de métaphysique, il annotait Spinoza et Bergson. » Licencié de philosophie en 1902, il entre au régiment pour accomplir, comme dispensé, son unique année de service militaire.

A cette âme inquiète et partagée la vie de soldat fut une révélation. Là point d’incertitude : la discipline ; point de rêveries inutiles, de discussions démoralisantes : l’action ; une vie régulière et saine, transfigurée par le sentiment du devoir et l’idéalisme patriotique. Du premier jour il fut conquis. En 19j04, il signe un réengagement dans l’infanterie ; mais, épris d’une

  1. La Vie d’Ernest Psichari, par M. Henri Massis (librairie de l’Art catholique, 1916 ; recueilli dans le Sacrifice, du même auteur, Plon, 1917 ; — Ernest Psichari, Terres de soleil et de sommeil (Calmann-Lévy, 1908) ; nouvelle édition, préface de Mgr A. Le Roy (L. Conard, 1917) ; — l’Appel des armes (G. Oudin, 1913) ; — le Voyage du Centurion, préface de M. Paul Bourget (L. Conard, 1916).
    Un frère d’Ernest Psichari vient de tomber lui aussi au champ d’honneur.