Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 40.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dont les profits ne se traduisent pas aussitôt pour lui en résultats palpables. Dans une classe plus aisée, les émissions d’emprunts ou les placemens d’actions nationales trouvent en Espagne peu d’écho. L’argent n’y manque pas ; mais il se réserve et se cache. On se plaint souvent que le capital espagnol soit timide. Le capital est toujours timide quand il a peur, parce qu’il a souffert précédemment de se montrer. C’est pourquoi les Espagnols se sont peut-être un peu trop hâtés dans certains cas où ils ont cru pouvoir opposer un protectionnisme intransigeant au maintien et au développement d’affaires étrangères.

Leur désir d’être seuls chez eux est parfaitement légitime ; mais il est prématuré. La coopération des capitaux français, qui atteint actuellement près de 3 milliards, reste nécessaire en Espagne, ne fût-ce que pour encourager les capitaux espagnols à se montrer. D’une façon générale, elle offre l’avantage d’assurer une double garantie aux intéressés. Avec les tendances actuelles de quelques gouvernemens à renouveler les lois chaque printemps comme poussent les feuilles, les capitalistes de tous les pays, et non pas seulement d’Espagne, rechercheront sans doute de plus en plus les affaires présentant un certain caractère international et pour lesquelles, par suite, une spoliation demandera du moins la complicité de deux Etats.

L’Espagne tire actuellement une juste fierté de son change ; mais il n’en est pas moins vrai que la balance de son commerce extérieur se traduisait encore, dans la dernière année normale, en 1913, par un déficit de 180 millions ; et ni le mouvement des touristes en Espagne ni les placemens espagnols à l’étranger ne sont suffisans pour faire l’appoint. Les résultats actuels, dus à des causes toutes momentanées, ne produiront des effets durables que si les exportations se développent, les importations ayant suivi, dans ces dernières années encore, une courbe ascendante très rapide. Des capitaux français, qui permettraient aux Espagnols d’exporter plus de minerais, de métaux, de produits agricoles, contribueraient du même coup à la prospérité du pays. L’association des capitaux, l’association des intérêts économiques, c’est, en notre temps, — et quand on y regarde d’un peu près, je crois que ce fut, presque à toutes les époques, — l’occasion la plus agissante et la plus efficace d’amitiés et de confraternités. Il n’y a de politique extérieure réellement efficace qu’une politique fondée sur les relations économiques. On