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L’ALSACE-LORRAINE À LA VEILLE DE LA DÉLIVRANCE.

pays civilisé, en Alsace moins qu’ailleurs. D’ailleurs, la question de race n’a rien à voir dans les destinées politiques d’un pays, comme le prouve le mieux l’exemple de la Suisse.

« 3o Au point de vue linguistique, l’Alsace occupe une situation spéciale. De même que l’Alsacien est obligé d’apprendre le haut allemand pour pouvoir le parler, de même il pourra apprendre le français pour être à même, comme autrefois, de s’élever aux plus hautes situations administratives et militaires. La question des langues ne joue de nouveau aucun rôle dans les destinées politiques d’un peuple et nous citerons à ce propos encore une fois la Suisse.

« 4o L’Alsace a vécu avec et dans la France les jours de la proclamation des Droits de l’homme et en a bénéficié. Par là, elle est devenue partie intégrante du pays. Les cœurs de ses habitans sont devenus complètement français, parce que précisément être Français signifie jouir de la liberté, de la démocratie et de la dignité humaine.

« 5o L’annexion de l’Alsace à l’Allemagne, en 1871, a été une violation criante des Droits de l’homme par une dynastie qui a toujours montré la plus grande réserve dans l’octroi de ces droits a son propre peuple.

« 6o L’Alsace veut redevenir libre. Et elle ne trouvera la liberté que là où elle est née, et non pas là où on l’a toujours ligotée. Elle veut faire retour à sa mère, à la belle et douce France. Elle tournera volontiers le dos au souverain et aux sujets qui se sont toujours comportés comme des seigneurs en Alsace. »

Il était intéressant de signaler ce curieux article. Si quelques Allemands affranchis parlent seuls de la sorte aujourd’hui, qui sait si, après la déchéance des Hohenzollern et des hobereaux prussiens, les anciens républicains de 1848, enfin libérés de l’emprise pangermanique, ne tiendront pas bientôt le même langage ?

Ni l’Allemagne officielle, ni les fractions politiques de toutes nuances du Reichstag n’en sont cependant encore venues à cette conception sereine du droit des Alsaciens-Lorrains. Bien au contraire, déconcertés par l’hostilité croissante d’une population, dont les lois d’exception et les pires mesures de rigueur n’avaient pas diminué la résistance, les Allemands de tous les partis annoncent qu’après une guerre victorieuse la