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Le général Foch, à la vérité, se rassurait à la pensée des renforts que venait de lui envoyer le général en chef Joffre. Celui-ci ne perdait pas un instant de vue le champ de bataille des Flandres, dégarnissant, sans hésiter, les fronts moins menacés pour nourrir la bataille du Nord. C’était, le jour du 31, la belle division Lanquetot — la 43e (du 21e corps) — et particulièrement cette brigade Olleris, formée de quatre bataillons de chasseurs des Vosges 1er, 3e, 10e et 31e, la fameuse brigade bleue qui, aussitôt débarquée, était mise à la disposition du détachement Woillemont à la droite du général Haig, le reste de la division restant à Vlamertinghe, en réserve. Mais Foch compte encore voir sous peu débarquer la 39e division, puis la 11e les deux divisions de ce 20e corps que naguère lui-même commandait devant Nancy. Cet afflux de solides soldats des deux corps lorrains est bien fait, en effet, pour rassurer l’ancien chef du corps de fer. Il attend donc de pied ferme l’ennemi, ce matin du 1er novembre, et sa confiance est partagée par tous les chefs français et anglais.

Mais la confiance et la résolution ne sont certainement pas moindres de l’autre côté. Tandis que Bavarois, Hessois, Wurtembergex)is, Prussiens, — et la Garde même, — s’apprêtent à de nouveaux assauts, un hôte illustre est apparu en Flandre : l’Empereur arrive à Thielt le 1er novembre, vers trois heures de l’après-midi. Très logiquement, le grand quartier général français, instruit assez vite de cette présence auguste sur le front adverse, en induit qu’il va se passer quelque chose de sérieux. De Thielt, Guillaume II se rend au IVe corps de cavalerie à Œlbeke, et, pendant cinq jours, l’Empereur attendra le moment de faire, derrière ses « incomparables troupes, » son entrée à Ypres, — en attendant Calais.

Il faut ce cordial aux « incomparables troupes. » Elles ont fait, dans les deux jours précédens, des pertes considérables. « Voilà, écrit un soldat du 237e en son carnet, voilà notre compagnie (250 hommes alors) réduite à 87 hommes : tous les autres sont blessés ou morts... Mais si cela dure huit jours, plus un seul homme ne restera. » Un rapport d’officier dit : « Le régiment n’a pu mettre en ligne ce jour (1er novembre) que 350 hommes... Les deux seuls officiers présens n’ont pu se mettre en liaison à cause du feu des ennemis... Il est très problématique que je puisse tenir à cause du manque de chefs. »