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monde. Verdun a peut-être plus contribué que la Marne à retourner en notre faveur l’opinion universelle. Jamais encore le génie militaire et la grandeur morale de la France n’avaient aussi pleinement « éclaté aux esprits. » Le geste de cette famille anglaise se levant d’un seul mouvement toutes les fois que le nom de Verdun était prononcé devant elle a pour pendant celui de M. Lloyd George ramassant quelques marrons sous « ces murailles inviolables » pour planter dans son parc une « allée de Verdun. » Et l’on se rappelle le beau, l’émouvant discours qu’a prononcé ce même M. Lloyd George dans les casemates de la vieille citadelle : « Pour moi, disait-il, je me sens profondément remué en touchant ce sol sacré. Je ne parle pas en mon nom seul : je vous apporte l’admiration émue de mon pays et de ce grand empire dont je suis ici le représentant. Ils s’inclinent avec moi devant le sacrifice et devant la gloire. »

A quelques semaines de là, dans ces mêmes casemates se déroulait une cérémonie d’une symbolique et imposante beauté. Entouré des principaux chefs français, des généraux représentans des puissances alliées, le Président de la République, dans un superbe langage, rendait hommage au dévouement et à l’héroïsme des soldats de Verdun, et il décernait à la ville imprenable les décorations militaires des divers Etats de l’Entente.

Et peu après, le général Nivelle, commandant l’armée de Verdun, pouvait écrire :


La supériorité nécessaire, nous la trouverons non seulement dans notre outillage et notre armement, qui ne seront cependant jamais trop puissans, mais aussi et surtout dans la résolution audacieuse, raisonnée et confiante des chefs. Nous la trouverons dans le cœur de nos admirables soldats, dont je pouvais dire récemment, en les montrant avec orgueil au chef de l’État, venu pour décorer nos drapeaux : « Jamais, même dans la vieille garde, il n’y a eu de pareilles troupes. » Ces soldats venaient de recevoir un hommage éclatant de leurs ennemis mêmes, dans le cri échappé à cet officier supérieur prussien au moment où il était fait prisonnier : « C’est triste de finir la guerre ainsi, mais c’est une consolation pour moi de rendre mes armes à de tels soldats : je n’ai jamais vu d’aussi belles troupes [1] ! »

  1. Préface du livre de M. Charles Nordmann, A coups de canon, 1 vol, in-16 ; Perrin.