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aux Berlinois. Ce n’est plus seulement l’Empereur, c’est le chef de guerre qui parle à ses armées et à son peuple : « Le cours des opérations de guerre a transféré le Grand Quartier Général hors de Berlin. Je me fie fermement à l’aide de Dieu, à la bravoure de l’armée et de la marine, et à l’inébranlable unité du peuple allemand dans ces heures de danger. La victoire ne désertera pas notre cause. »

Voici donc la conception allemande en voie de réalisation. Le chancelier Bethmann-Hollweg l’a dit et répété : « L’offensive par la Belgique, c’est, pour nous, une question de vie ou de mort. » Les états-majors ont médité leur coup : attendre, surprendre, tromper, frapper. Ils ont massé dans l’ombre les énormes effectifs armés et entraînés qu’une volonté sans précédent emporte dans le vertige du grand mouvement tournant.


Quels étaient ces effectifs ?

L’art des Allemands fut de développer, dès l’abord, sur la Belgique, un réseau de troupes de couverture, cavalerie, artillerie, infanterie extrêmement mobile, et ayant pour mission de voiler les emplacemens des gros, tout en donnant, par leur tactique, l’impression d’une démonstration et, si j’ose dire, d’un bluff plutôt que d’une action à fond et décisive. « Couvrir et découvrir, » terroriser le pays et tromper l’adversaire, tel était l’objet de cette première invasion militaire confiée aux corps de cavalerie Bichthofen et von Marwitz. La mission fut accomplie avec une remarquable énergie et un grand savoir-faire technique : elle contribua à créer la « surprise » sur laquelle comptait le grand état-major.

Derrière ce rideau mouvant, les gros se mirent en branle à partir du 19. Que l’on tire, sur la carte, une ligne Nord-Sud passant par Diest, Tirlemont, Hannut, Andenne, Ciney, Rochefort, en un mot une ligne se développant en arrière de la Gette et de la Meuse : c’est à l’Est de cette ligne que les gros allemands sont arrêtés, tandis que les troupes de couverture sont lancées sur le territoire belge.

Le 19, l’alignement est rompu et les gros se mettent en branle d’un formidable et unique mouvement d’Est en Ouest.

Trois armées y prennent part : au Sud, en liaison avec l’armée du duc de Wurtemberg qui reste dans les Ardennes, la 3e armée (armée von Hausen) se porte du Luxembourg (environs