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L’armée alliée n’est pas tournée ; et elle n’est pas coupée. Tel était cependant le plan, subsidiaire peut-être, mais non moins soigneusement combiné, du grand état-major allemand.

Dans la préparation du piège, les armées allemandes avaient été, ainsi que nous l’avons indiqué, gardées le plus longtemps possible dans le Luxembourg belge et le duché du Luxembourg, et comme cachées dans les forêts des Ardennes. Puis le mouvement tournant s’était déclenché, et les 2e et 1re armées s’étaient mises en marche. Cependant une armée, un peu moins importante en nombre, était restée pour ainsi dire au nid : c’était l’armée saxonne, l’armée von Hausen. Le projet de l’état-major allemand était de la détendre comme un ressort à l’heure opportune en la dardant sur la Meuse à la jonction de notre 4e armée (de Langle de Cary) et de notre 5e armée (Lanrezac). Là, elle devait passer la Meuse vers Dînant, Hastière, Monthermé, rompre la ligne française et se jeter sur les communications de la 5e armée, tandis que celle-ci serait encore engagée dans les combats de front contre Büilow et Kluck. Projet conçu avec une sagacité redoutable et si soigneusement exécuté que notre haut commandement ne connut l’existence de l’armée von Hausen que quand elle eut débouché.

Mais, de ce côté encore, le général Joffre, dès le début, avait paré. Son sentiment formel était qu’il ne fallait, à aucun prix, laisser se produire un vide quelconque outre sa 5e et sa 4e armée. Aussi, avec une insistance remarquable et qui forme le trait principal de ses instructions réitérées, il s’était refusé toujours à laisser la 5e année s’éloigner vers l’Ouest ou remonter trop au Nord et il avait confié le soin de garder ces contacts à ce que ses armées comptaient de plus solide, le 1er corps de la 5e armée et le 9e corps de la 4e armée, renforcés par la 52e et la 51e divisions de réserve.

Si bien que, quand l’armée von Hausen se présente, elle trouve à qui parler. Les faits exposés dans l’Histoire de la guerre de 1914 établissent que le 9e corps (général Dubois) contient l’armée von Hausen vers le Sud, que la 52e division de réserve (général Coquet) l’empêche de déboucher au centre et que, comme cette armée a franchi la Meuse, le 23, en refoulant la 51e division de réserve, à Hastière-Onhaye, le ler corps (général Franchet d’Espérey) se retourne vers elle d’un superbe mouvement et jette l’avant-garde du XIIe corps saxon à