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qu’aux hommes et les émancipa également, ne soumit pas trop durement à leur mari celles qui étaient mariées et reconnut aux deux époux les mêmes droits quant aux acquêts de la communauté. Il établit encore une protection contre les actes arbitraires des employés de l’Etat, et contre les arrestations injustifiées. Il n’admet en effet ni tribunaux spéciaux pour des citoyens privilégiés, ni classes sociales non soumises à la loi. Qui voudrait faire adopter ce qu’il rejette, commettrait un crime contre l’époque à laquelle nous vivons. »

En vérité, aucun Français n’a mieux écrit que cet Allemand.


III. — LA GUERRE RELIGIEUSE.

La chute du régime français a déterminé en Allemagne une longue crise confessionnelle dont les juifs et les catholiques ont été les victimes. Les premiers, qui avaient été émancipés par l’empereur Napoléon, ressentirent durement la perte de leur protecteur. Sans doute Hardenberg et Metternich, au Congrès de Vienne, avaient pris position en leur faveur, mais la réaction ne se fit pas attendre. A Francfort, on leur enleva leurs droits politiques et la subvention qu’ils recevaient pour leurs écoles : quelques concessions, consenties en 1824, ne les désarmèrent pas. En Prusse, et par conséquent sur la rive gauche du Rhin, il leur fut interdit de devenir professeurs d’université et de gymnase ou de prétendre aux grades d’officiers ; une société protestante, dont le roi Frédéric-Guillaume III approuva l’activité, se fonda bientôt afin de les convertir et de les baptiser. Cette politique de défiance et de vexations a eu pour résultat que les Juifs, pendant de longues années, ont pris la tête du mouvement libéral et se sont fait remarquer par leurs sympathies françaises.

L’histoire des agressions subies par les catholiques dans certaines contrées de l’Allemagne, quoiqu’elle soit déjà connue par les belles études, parues ici même, de M. Georges Goyau, mérite d’être exposée en détail, à cause de la signification politique qu’elle revêt. Le règne de Napoléon n’avait pas été exempt de difficultés. Après la protestation du Saint-Siège contre les Articles organiques, d’autres différends s’étaient élevés ; le pape avait été interné à Fontainebleau, et s’était refusé à instituer les évêques nommés par l’empereur, de telle