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affectueuses comme celles-ci : « On nous connaît mal chez vous. On y est enclin au soupçon envers le vrai sentiment de la Hollande. Un article injuste, une critique imméritée, nous a plus nui dans votre esprit que ne nous ont servis une conduite loyale et un attachement obstiné à des principes qui sont les vôtres. Il y a eu méprise sur notre compte. Et c’est votre faute. Pourquoi ne venez-vous jamais chez nous ? Vous ne nous méconnaîtriez pas, si vous vouliez vous donner la peine de nous connaître. Mais vous vous êtes peu à peu retirés de nous. Vous vous êtes désintéressés de la petite Hollande, quitte à accueillir avec un peu trop de légèreté le moindre bruit défavorable. Ne tenez-vous aucun compte de notre situation, de nos difficultés ? Pourquoi n’avez-vous pas une presse plus juste, mieux informée, celle que vous mériteriez d’avoir ? Pourtant, malgré la méconnaissance dont nous sommes l’objet, nos sentimens sont pour la France. Vous vous en serez bientôt convaincus. Au reste, jugez-nous à l’œuvre. »

Ils n’ajoutaient pas, car ils ont la charité modeste : « Jugez-nous à nos œuvres. » Mais ces œuvres multiples, inspirées par une inépuisable générosité, pratiquées avec autant d’ardeur que de délicatesse, nous frappaient sitôt débarqués. Les plus nombreuses, et de beaucoup, avaient pour objet la nation belge, la voisine et la sœur. La détresse belge émut le tendre cœur de la Hollande d’une pitié qui se traduisit par les actes publics et privés les plus touchans. Par toutes les frontières méridionales, dans ces plats pays sans frontières, le flot des misères remonta, marée humaine qui inonda le pays et à laquelle l’âme hollandaise n’opposa point de digues. Pourtant, c’était un surcroit de population d’un quart environ, sinon davantage, qui venait déferler sur son étroit territoire : douze cent mille après Liège et Louvain, aujourd’hui plus de quinze cent mille. Et la Belgique n’épuisa pas la charité hollandaise. La Néerlande voulut aussi travailler pour la France. Elle donna, elle se multiplia, elle fournit des marraines aux prisonniers français, elle expédia des colis, elle saisit les occasions ou les provoqua. Notre arrivée coïncidait avec celle des petits enfans français, évacués, à travers la Belgique envahie, de la région de Lille et de Roubaix. Mme Allizé, la femme de notre ministre, allait les recevoir à la frontière de Rosendaal, le lendemain. Nous les visitions avec elle, quelques jours après,