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époux. Au moment d’unir leurs mains, Helena retire la sienne : « Jamais ! jamais, je n’y consentirai ! — C’en est trop ! s’écrie Montfort furieux, de gré ou de force vous y consentirez ! » Il prend avec violence la main d’Helena et celle de son fils : « Fiancés, soyez unis ; flambeaux de l’hyménée, brillez pour eux, et vous, cloches saintes, annoncez leur bonheur ! »

Les cloches sonnent.

Toutes les. portes du palais s’ouvrent ; les Siciliens, le poignard et la torche à la main, s’élancent sur Charles de Montfort et les Français. Luidgi se jette au-devant de son père et Helena à côté de son mari ; les haches sont levées sur eux. La toile tombe et le massacre commence derrière la toile.

Il y a encore bien à dire, bien à faire. Rêvez à cela pendant que vous garderez la chambre. Gardez surtout ce scénario, si vous pouvez le lire, et nous en causerons à votre première visite.

Merci mille fois du cadeau que vous me faites de la Perle de Venise.

EUG. SCRIBE.


Bref, le 13 juin 1855, au début d’une exposition universelle qui allait amener à Paris une foule de visiteurs, l’Opéra représentait les Vêpres siciliennes, œuvre inédite de Verdi, sur des paroles de Scribe et de Duveyrier. Le succès fut considérable et incontesté. D’abord, l’amour-propre italien en avait fait un véritable événement : les compatriotes du compositeur qui étaient ses partisans s’étaient donné rendez-vous en masse dans la salle, et on assure que presque tous les dilettantes aisés de Milan, Turin et d’autres villes de la Lombardie étaient venus assister à cette représentation mémorable. L’exécution fut remarquable et la Cruvelli en particulier interpréta avec une chaleur communicative la musique de Verdi. D’ailleurs, celui-ci avait soigné son ouvrage : la critique y reconnaissait plus d’unité, plus de tenue que dans les précédens. On chicana un peu les librettistes sur l’aventure qu’ils avaient mise à la scène. « Il faut avouer, écrivait P. Scudo, dans le numéro du 1er juillet de cette Revue, que MM. Scribe et Duveyrier auraient pu choisir un sujet plus convenable que celui des Vêpres siciliennes pour être mis en musique par un Italien et représenté sur la première scène lyrique de la France. Il y a des convenances qu’on fait toujours bien de respecter au théâtre, et le champ de l’histoire est assez vaste pour que M. Scribe ne fût pas embarrassé de trouver un thème quelconque au petit nombre de