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Juifs. Converti, assure-t-on, par le prince de Broglie, il s’agita assez pour être élu « président du Collège électoral du département de l’Isère, » — ce qui lui permit d’élire pour évêque l’oncle de sa femme — et, ensuite, le 28 août 1791, député à l’Assemblée législative. On discerne mal le rôle qu’il y joua, plutôt d’un royaliste constitutionnel, mais avec des nuances : tantôt il préconise les mesures qui ne peuvent manquer d’amener la guerre, tantôt il propose une loi sur le divorce ; il combat successivement les Girondins, les anarchistes et les fédérés. Il est modéré presque constamment, sauf sur les questions religieuses où il divague ; pour ce qui est du militaire, il est nettement patriote, il entend sauver les drapeaux des anciens régimens ; il défend La Fayette, il insiste pour l’envoi aux frontières des gardes nationaux et des fédérés qui encombrent Paris et qui l’oppriment. En juillet, il est élu président, et c’est son chant du cygne. Il ne parait plus que rarement après le Dix Août ; et c’est pour réclamer, comme amendement au nouveau serment de haine à la royauté, le serment de ne souffrir jamais qu’aucun étranger donne des lois à la France. Après le Dix Août, « il vint se placer, dit l’un de ses biographes, dans les rangs de ses collègues condamnés comme lui à la nullité, et il échappa par son silence aux proscriptions. » Il ne brigua point d’être élu à la Convention et réclama d’être employé aux armées : il le fut. Rentré capitaine en octobre 1792, il fut promu lieutenant-colonel au 42e régiment ci-devant Saintonge, employé comme chef de brigade pour commander à Worms, de là envoyé à Mayence par Custine, nommé général de brigade, le 2 avril 1793, par le conseil de guerre, et chargé, comme tel, de remplacer le général Meusnier qu’il ne pouvait faire oublier.

Après la capitulation, il fut accusé, mis en arrestation, conduit à Paris, innocenté sur le témoignage de Merlin de Thionville, accueilli avec honneur par la Convention, embrassé par le président, — et il resta suspect. On l’envoya en Vendée avec la garnison de Mayence, et il fut d’abord battu à Clisson. Bien qu’il eût presque aussitôt pris sa revanche à Saint-Symphorien, il fut dénoncé par Maribon-Montaut et rappelé par Bouchotte, ministre de la Guerre. Il devait paraître à six heures du soir à la barre de la Convention ; à cinq, Bouchotte le fil arrêter, incarcérer à l’Abbaye ; son affaire était bonne.

Il le savait et se préparait en lisant les Nuits d’Young. A sa