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ont été blessés, et l’autorité procède à de très nombreuses arrestations. Pendant ce temps, dans la région de la Moselle, l’agitateur Grün force et pille la citadelle de Prüm avec l’aide d’hommes de la landwehr révoltés qui verront fusiller trois des leurs le 14 octobre dans les fossés de la forteresse de Sarrelouis.

Mais ce ne sont là que de brefs épisodes. Alors que les restes du Parlement de Francfort se sont réfugiés à Stuttgart où ils ont constitué une régence de cinq membres parmi lesquels figurent Schiller, de Deux-Ponts, et Raveaux, la résistance, encouragée par ces libéraux irréductibles, se transporte en Bade et dans le Palatinat. Les révolutionnaires ennemis de la Prusse, et qui ont été refoulés du Nord par les troupes de Frédéric-Guillaume IV, se rassemblent dans le Sud. Leur armée se monte bientôt à 30 000 hommes environ. Elle embrasse la presque totalité des forces badoises et les contingens du Palatinat soulevés contre la Bavière, auxquels se sont réunis beaucoup de Rhénans sujets de la Prusse ; à Mayence, où l’on n’a pas oublié l’émeute de mai, Zitz forme sept compagnies de Hessois qui se joignent aux insurgés. Malheureusement, cette armée ne possède qu’un armement défectueux, elle est peu instruite, et quelques semaines suffisent pour qu’elle soit complètement vaincue.

Nous avons prouvé que la Révolution de 1848, dans la vallée du Rhin, a revêtu un caractère nettement antiprussien. Il nous reste maintenant à démontrer qu’elle a eu des tendances françaises, et nous le ferons sans peine, encore que les chefs du mouvement aient été contraints à une certaine discrétion et qu’au-delà de nos frontières les historiens modernes passent le plus souvent sous silence tout ce qui blesse leur patriotisme ombrageux. D’une façon générale, on peut dire que les démocrates avancés ont souhaité le secours de la France, et qu’en elle seule, justement parce qu’elle s’était constituée en République, ils ont vu la force active capable de faire triompher leurs idées. Quel devait être le prix de son intervention ? La rive gauche du Rhin sans doute, car nul n’ignorait en 1848 à quel point les populations arrachées à la France en 1815 détestaient la tyrannie prussienne. Le sacrifice eût semblé mince, s’il avait été compense par une aide efficace. Assurément, quelques révolutionnaires ont marqué une certaine réserve : il s’en est même trouvé pour écrire que la seconde République accorderait