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sont des signes certains qui dénoncent hautement le malaise. Encore ne veut-on relever par prudence que ce qui se voit; mais il y a bien pis, on le sent. Tout n’est pas fureur de théâtre dans les querelles du parti de la « Patrie allemande » et de la majorité du Reichstag; les lignes du vieil Hindenburg ne sont pas toutes en territoire étranger; tous les communiqués de Ludendorff ne sont pas pour le dehors, ni toutes les torpilles de M. de Tirpitz pour les bâtimens de commerce ennemis et neutres. L’Allemagne politique vacille, plus encore que l’Allemagne militaire.

Mais, il faut franchement le reconnaître : politiquement, c’est-à-dire dans les conditions de la vie politique intérieure de chacun des États qui la composent, l’Entente n’est guère mieux partagée. L’Angleterre a eu ses secousses. L’Italie est au bord de la crise. Les symptômes, depuis cet été, en étaient de plus en plus abondans et de plus en plus aigus. On avait eu, le 12 août, la circulaire adressée aux maires socialistes, par M. Costantino Lazzari, secrétaire du parti, ce Lazzari que quelqu’un a plaisamment baptisé, à cette occasion : Il Segretario non fiorentino, et qui, pour le rappeler en passant, aurait assisté à l’une des réunions de notre parti socialiste, à nous, lors des palabres tenues quand fut défait le cabinet Ribot. Ladite circulaire contenait, entre autres beautés, cette phrase monumentale : « Tu connais, écrivait à chacun des « chers camarades maires, » avec le tutoiement civique, le citoyen Costantino Lazzari, tu connais la résolution exprimée à la Chambre par les camarades députés contre un troisième hiver de guerre. Un parti comme le nôtre doit, avec honneur et fermeté, maintenir foi à la parole donnée. Les communes sont, sans conteste, un moyen politique très puissant par l’influence directe qu’elles ont sur les populations; eh ! bien, celles qui ont été conquises par nous doivent toutes servir, dans un acte concordant et solidaire de protestation et de résistance, à faire triompher notre thèse; avant l’hiver, la paix. » Le 25 septembre, M. Lazzari réitérait sa démarche, qui n’avait pas donné tout l’effet attendu, et, le 26, la direction du parti socialiste, que harcelaient, de Rome, de Milan et de Parme, les manifestations hostiles de l’opinion, déchaînée par la publication du document, en prenait avec lui la responsabilité. A Turin se produisait, à propos ou sous prétexte d’un manque de vivres, une échauffourée qui touchait à l’émeute.

Ces agitations se répercutaient vivement sur le milieu parlementaire. Et, tandis que, d’un côté, du côté des « interventistes, » on blâmait la mollesse du ministre de l’Intérieur, M. Orlando,