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quelques-uns plus récens, mais déplorablement médiocres, comme les deux épisodes de la guerre de Grimée dont on a orné le salon d’attente.

Ici, rien de la fièvre ni de la bousculade qui sévissent au ministère de la Guerre, de l’autre côté de l’eau. Contraste dû à la dissemblance radicale entre les conditions où nos armées de terre et de mer fonctionnent en temps de paix, bien plus encore qu’à l’énorme disproportion de leurs effectifs. Car, à bord, on est toujours en présence de l’irréconciliable ennemi qu’est l’Océan, l’autre ne venant que par surcroît, et tout voyage peut être considéré comme une « campagne, » ainsi qu’on les appelait naguère., Que le navire soit chalutier, croiseur ou dreadnought, qu’il « arme, » — autre terme non moins significatif, — pour la pêche à la morue sur le banc de Terre-Neuve, pour un tour du monde, ou doive stationner le long des côtes, ses préparatifs ne différeront guère de ceux que suppose la chasse aux sous-marins ou une sortie pour livrer bataille. Donc les bateaux étaient prêts, et je puis ajouter, admirablement entraînés. À ce point de vue, ils forceront même l’admiration des Anglais, les meilleurs juges en la matière. Après quelques dispositions rapidement prises au fur et à mesure que l’horizon se chargeait, telles que rappel des officiers et matelots permissionnaires, complètement des approvisionnemens et munitions, fermeture des écoles, concentration des diverses unités autour des chefs de groupes, nos escadres n’attendaient plus que le signal de se rendre à leurs postes de combat.

En ce qui concernait la guerre avec l’Allemagne, deux alternatives avaient été admises, suivant que l’Angleterre se rangerait ou non de notre côté. L’Entente cordiale rendant la première de beaucoup la plus probable, nous avions concentré tous nos cuirassés de bataille dans la Méditerranée, que nous nous chargions de défendre, ne conservant dans la Manche que de vieux croiseurs démodés et des flottilles destinées à agir en liaison avec les forces britanniques. Nous verrons tout à l’heure de quelle manière. Mais notre dispositif prévoyait aussi le cas où nous resterions seuls, comme on put le craindre un instant. Les positions initiales que devaient prendre nos divisions du Nord étaient à peu près les mêmes dans l’une ou l’autre supposition, pour conduire, bien entendu, à des opérations totalement différentes, suivant celle des deux qui se réaliserait.