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pain, sans feu ni lieu. En mémoire de sa sœur, le vieux Boirouge recueillit donc son arrière-petite-nièce dans sa maison de Sancerre, en 1810.

Vers la fin de l’année 1821, époque à laquelle commencent les événemens de cette histoire, le père Boirouge était à la tête d’une immense famille.

Boirouge-Bongrand, son fils aîné, était mort, laissant deux fils et deux filles, tous quatre mariés et ayant tous quatre des enfans, ce qui faisait, de ce côté, quatre héritiers du père Boirouge, ayant chacun des enfans. Or, à quatre par famille, cette branche offrait vingt-quatre têtes, et se composait de Boirouge-Bongrand, dit Ledaim, de Boirouge-Bongrand, dit Grosse-Tête, de Mirouet-Boirouge-Bongrand, dit Luciot, de Popinot-Boirouge-Bongrand, dit Souverain, car chacun des chefs avait, d’un commun accord, adopté des surnoms pour se distinguer, et, dans la ville, ils étaient connus plus sous les noms de Ledaim, de Grosse-Tête, de Luciot et de Souverain, que sous leurs doubles noms patronymiques. Ledaim était drapier, Grosse-Tête faisait le commerce du merrain, Luciot vendait des fers et des aciers, Souverain tenait le bureau des diligences et était directeur des assurances.

La seconde ligne, celle des Boirouge-Chandier, l’apothicaire, s’était divisée en cinq familles, et Boirouge-Chandier avait péri malheureusement en faisant une expérience chimique. Son fils aîné lui avait succédé et gardait le nom de Boirouge-Chandier. Il "était encore garçon, mais il avait deux frères et deux sœurs. L’un de ses frères était huissier à Paris ; l’autre tenait l’auberge de l’Écu de France ; l’une de ses sœurs avait épousé un fermier, et l’autre le maître de poste. Cette seconde ligne présentait un total de trente personnes, tenant par ses alliances à toute la population protestante.

La troisième branche issue du père Boirouge était celle du juge Boirouge-Popinot. M. Boirouge-Popinot vivait encore ; il avait six enfans, tous destinés au barreau, au notariat et à la magistrature. L’ainé était substitut du procureur du Roi à Nevers ; le second était notaire à Sancerre ; le troisième, avoué à Paris ; le quatrième y faisait son droit ; le cinquième, âgé de dix ans, était au collège [à Vendôme]. Le premier enfant du juge était une fille, mariée à un médecin de Sancerre, M. Bianchon, le père du célèbre docteur Bianchon, de Paris, lequel