Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 44.djvu/747

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

seulement après l’attaque, lorsque l’infanterie qui s’installe sur les positions conquises est encore sans abris, que se produisent presque toujours les réactions d’artillerie les plus dangereuses. Si les troupes d’assaut ont pénétré jusqu’à l’artillerie adverse et s’en sont emparées, — comme ce fut le cas, par exemple, à la bataille de la Malmaison, le 23 octobre dernier, les pertes sont réduites au minimum.

Dans la guerre de tranchées, on attaque à coups de canon, on se défend à coups d’hommes. ; car le défenseur est forcé d’engager ses réserves pour boucher les trous ouverts dans ses lignes et pour compenser son infériorité en artillerie. Vouloir proscrire l’offensive pour épargner les vies humaines, c’est aller directement à l’encontre de son but [1]. Nous et nos Alliés nous sommes forcés d’agir. Agir, non seulement pour user l’ennemi, mais pour lui enlever sa liberté d’action. A la guerre, l’initiative de l’attaque a des avantages incontestables, et la défensive comporte toujours des risques, en laissant la porte ouverte à des surprises.

Quelle forme prendront ces actions d’usure prochaines sur des fronts fortifiés ? Nous n’en savons rien ; les procédés de la guerre varient autant que les circonstances. Les batailles livrées depuis trois ans sur le front franco-anglais nous offrent des exemples très divers de lutte d’usure efficace. Nos chefs sauront exploiter les formules anciennes ou trouver des formules nouvelles, pour poursuivre la tâche commencée en épargnant le plus possible les vies humaines. Ce qui serait absurde, ce qui est criminel, c’est de prétendre que nous avons échoué, parce que jusqu’ici nous n’avons pas renversé la barricade. L’ennemi lui-même nous a démontré l’efficacité de notre action en s’y dérobant, à deux reprises, par des replis ; non, comme il l’a prétendu, pour préparer une reprise de l’offensive, mais simplement pour éviter de se laisser user.


{{***}

Mais ne renverserons-nous jamais la barricade ? Et, s’il est vrai que l’offensive a, sur la défensive, de tels avantages, ne devons-nous pas répondre à deux autres questions ? Pourquoi

  1. Qu’on demande à ceux qui se battent ce qu’ils préfèrent : marcher à l’assaut dans les conditions où sont préparées les attaques d’aujourd’hui, ou tenir sous certains bombardemens.