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l’autre, la distance d’Ostende au front belge n’étant plus que de 18 kilomètres, l’ancien port de la Flandre occidentale devient justiciable de l’artillerie à longue portée des Alliés. Celle-ci est d’ailleurs intervenue déjà, affirment les relations anglaises, dans l’affaire du 24 avril ; et si nous ne pouvons malheureusement nous flatter de posséder en ce moment des bouches à feu analogues à celles qui bombardent Paris[1], il est certain que nous en avons déjà dont le projectile peut franchir les 38 kilomètres qui séparent Zeebrugge du front de bataille et pour qui ce n’est qu’un jeu d’atteindre avec une justesse suffisante les points que leur désigneront à Ostende les appareils aériens chargés du réglage du tir.

Voilà donc les mouvemens de ce port très contrariés, si le bombardement acquiert quelque intensité. Et nous ne parlons que des canons mis en batterie à terre. À ceux-ci peuvent se joindre les bouches à feu des monitors circulant au milieu des bancs qui s’étendent en vagues parallèles au large de Dunkerque, de la Panne, de Nieuport même et que séparent des « fosses » où l’on trouve 6 à 10 mètres au moins, au bas de l’eau. Enfin il faut faire état des avions et hydravions dont les raids devront se succéder d’une manière aussi continue que possible. Dans de telles conditions, il n’est pas probable que le port d’Ostende retrouve l’activité qu’il avait avant le coup de main du 23 avril.

Le bénéfice est donc fort sensible. Mais c’est évidemment à la condition que le chenal de Zeebrugge ne soit pas trop tôt déblayé. À la date du 29 avril, on nous fait connaître, de Hollande, que les travaux de démolition des carcasses coulées sont entrepris déjà, ce qui ne surprendra pas ceux qui connaissent l’activité des Allemands et la promptitude de leurs décisions. Il est donc intéressant pour les Alliés d’entraver par tous les moyens possibles ce travail de restauration et il est clair qu’on n’aurait, — au point de vue purement matériel, dont il

  1. Il a paru dans la presse quotidienne, il y a un mois environ, une lettre fort intéressante d’un officier de l’ancienne artillerie de marine (aujourd’hui artillerie coloniale) qui rappelle que de longues expériences furent faites chez nous, il y a un quart de siècle environ, avec un canon de 164,7 (type de la marine) d’une longueur de 80 calibres. Il s’agissait d’exécuter toutes les recherches nécessaires pour la mise en service définitive de la poudre B. Mais comme en ce qui touche les combats sur mer, les portées considérables n’offrent pas d’intérêt pratique, on s’abstint de toute expérience à ce sujet.