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parlementaires éblouis les taux extrêmes auxquels il est porté pour les grosses fortunes qui, soit dit en passant, sont beaucoup plus nombreuses dans le Royaume-Uni que chez nous. Mais on oublie d’ajouter qu’en dehors de l’impôt sur le revenu et des droits de succession, il n’existe pour ainsi dire pas de taxes directes en Angleterre, et que là-bas il n’y a jamais superposition ; tandis qu’à notre impôt global sur le revenu, qui s’est élevé par bonds de 2 à 12 et demi pour 100 et menace de passer à 20 pour 100, s’ajoutent une série d’impôts cédulaires sur les revenus. Le taux véritable acquitté par ceux-ci est dissimulé par cette variété. Si l’on additionnait toutes ces taxes et qu’on y ajoutât la charge moyenne annuelle qui résulte des droits de mutation, on serait surpris de constater qu’à l’heure actuelle, en plus d’un cas, le taux de l’impôt prélevé en France sur le revenu dépasse celui de la Grande-Bretagne.

Il vaudrait mieux fondre toutes ces taxes en une seule, qui démontrerait alors la véritable contribution apportée par chacun de nous au budget et qui, du coup, ferait taire les clameurs de ceux qui prétendent que la richesse « acquise » ne fournit pas sa part des recettes publiques. Voilà une épithète dont on a singulièrement abusé ! Comme si toute richesse n’était pas acquise ou en voie de l’être ! Le jour où les réformateurs impatients apprendraient dans quelle proportion les revenus sont déjà amputés, ils seraient moins prompts à nous citer l’exemple de l’étranger. N’oublions pas enfin l’impôt sur les successions, qui vient régulièrement prélever une fraction grandissante des patrimoines. C’est ce droit d’héritage qui est en réalité le seul impôt sur le capital admissible, et encore convient-il de le contenir dans de certaines limites, sous peine d’enlever au père de famille l’une des plus puissantes incitations à l’épargne : 1e souci de ses descendants.

D’après la loi du 31 décembre 1917, les droits de succession, majorés d’une surtaxe sur les héritages qui se partagent entre moins de quatre enfants, peuvent atteindre, même en ligne directe, jusqu’à 36 pour 100. Il semble difficile d’aller plus loin. Que l’on réfléchisse à la rapidité avec laquelle les générations passent et à la fréquence des transmissions d’un même bien. On serait étonné de constater la brièveté du délai qui suffit au fisc, dans bien des circonstances, pour absorber le plus clair de l’actif d’une succession. Dans l’exemple que nous