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Du 23 janvier 1836.

« Bonsoir, jeune écervelé. Mon enquête est finie, mon procès touche à sa conclusion. J’en attends le résultat avec un calme philosophique. J’ai trois juges, dont l’un avait, du temps qu’il n’était pas veuf, l’innocente habitude de vendre sa femme au plus offrant ; l’autre est abruti par l’… Le troisième est, je crois, honnête, mais constipé, goutteux, hargneux, jaloux de la force et de la santé de son prochain. Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Salut !

« Dites-moi les causes du silence de Sainte-Beuve à mon égard. Mes façons d’agir et de penser lui sont antipathiques, surtout depuis qu’il a quitté la cellule pour les salons. Je ne force l’amitié de personne, mais je tiens à la franchise ; quand on me boude ou qu’on me fuit, je veux savoir pourquoi, car je ne me brouille jamais avec personne sans lui dire hardiment et franchement mes raisons. Bien n’est plus insultant que de laisser dans l’incertitude celui qu’on veut abandonner. C’est l’exposer à être importun et ridicule. Je lui ai écrit, qu’il me réponde, fut-ce pour me dire qu’il ne veut plus entendre parler de quelqu’un dont on dit tant de mal…

« Je vous prie de mettre de côté le manuscrit de Simon ; un imbécile de mes amis me l’a demandé depuis longtemps et je l’ai promis : quoique ce soit un cadeau stupide, il y tient. »

Cet « imbécile de ses amis » c’est Michel de Bourges, F. Buloz le note : « le héros du roman. »


LE PROCÈS EN SÉPARATION

Pendant ce temps, George est toujours à la Châtre, attendant l’issue de son procès ; mais elle est, sur ce sujet, tranquille, et le trouve « imperdable en Cour royale, imperdable même au Tribunal de la Châtre, où la jugerie est pourtant ignoble… s’il y a appel, l’affaire durera six semaines de plus. » Mais elle veut dans tous les cas aller à Paris, embrasser ses enfants, et quitter l’appartement du quai Malaquais.

« Voyez-vous Maurice ? Il m’écrit des lettres charmantes. Je suis malade de le voir, ainsi que sa sœur. Du reste, je suis à la