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Sarrebrück et de Saint-Jean ; dans les Mémoires qu’il leur adresse, il énumère avec la convoitise d’un avare toutes les choses bonnes à prendre ou susceptibles d’un bon revenu pour l’État : une très importante forge et fonderie, reliée à une mine et à une école de métallurgie ; des mines de houille, de belles et vastes forêts. En outre, comme établissements particuliers, il yak Sarrebrück, dit-il, deux forges importantes, deux aciéries, une fabrique de faulx, de serpes et de couteaux, une fabrique de limes, plusieurs fabriques de clous ; une saline, deux fabriques de draps, des carrières de pierre à bâtir, des brasseries, une fabrique de papier, etc.

Les historiens locaux d’aujourd’hui ne tarissent pas d’éloges sur le zèle et l’habileté que Böcking déploie dans ces circonstances, pour entraîner les négociateurs à renier leur promesse de respecter la frontière imposée à la France en 1814. Mais, à l’époque où était tramée cette félonie, ce n’étaient pas seulement les habitants de Sarrebrück qui, en grande majorité, se montraient atterrés à la nouvelle qu’on méditait de leur imposer la domination prussienne : les ingénieurs français de l’Ecole de Geislautern unissaient leurs protestations aux leurs. « Ces ingénieurs, dit M. Engerand, qui avaient tout fait pour la mise en valeur du bassin houiller et s’étaient attachés à leur œuvre, la voyaient passer à l’ennemi, au moment de donner ses résultats ; leurs efforts pour augmenter la puissance de la France profiteraient à un État qui la haïssait ; ils ne se résignaient pas. »

Tandis que les diplomates discutent et que Böcking s’agite, ils avertissent notre gouvernement, ils l’adjurent de ne pas céder. Le 23 octobre 1814, l’ingénieur de Bonnard écrit à notre ministre des Affaires étrangères pour faire observer que le traité qu’on a consenti et qu’on s’apprête à ratifier, — la ratification définitive est du 28 novembre 1815, — nous enlève le pays de Sarrebrück, si important « par ses belles forêts, ses nombreuses usines et fabriques, et surtout par ses mines de houille dont les produits sont nécessaires au chauffage des habitants du département de la Moselle, à l’administration des usines que ce département renferme et surtout à celle des salines du département de la Meurthe… Faut-il que la ville de Metz et les salines les plus importantes de la France soient obligées de tirer de l’étranger le combustible dont elles ont