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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Le lundi 27 mai, à une heure du matin, l’artillerie allemande s’est mise à faire feu de tous ses tonnerres. Elle a écrasé nos lignes d’obus de gros et de moyen calibre, les a inondées de gaz toxiques, a, par une pluie de fer et par un déluge de poison, rendu le terrain intenable. Cette espèce de typhon artificiel, ce cataclysme qui, dans le langage de la guerre moderne, s’appelle « une préparation, » a sévi trois heures durant. A quatre heures, l’infanterie s’est ébranlée en masses profondes, divisions sur divisions. Dès le premier choc, et pour le premier bond, on en a compté une trentaine, Le secteur où s’est développée l’attaque s’étendait depuis Vauxaillon, au Nord de Soissons, jusqu’à Brimont, au Nord de Reims. L’Ailette, l’Aisne, la Vesle, ont été successivement et très vite franchies. Le Chemin des Dames, que nous avions, au printemps et à l’automne de 1917, enlevé pas à pas, au prix de durs efforts et de sacrifices douloureux, le plateau de Craonne, deux fois au moins consacré dans notre histoire, les hauteurs en arrière, entre l’Aisne et la Vesle, n’ont été pour nous que de faibles et impuissants boulevards. Mais essayons de voir clair dans l’événement, quitte à en simplifier un peu les composantes, et, pour comprendre la bataille, divisons le champ de bataille en trois parties, que nous parcourrons séparément.

Tout d’abord, la partie occidentale, région de Soissons. On sait, et nous venons de rappeler, d’où s’était déclenchée l’attaque de Vauxaillon, le 27, à quatre heures du matin. Ce même jour 27, vers midi, elle avait déjà assez « progressé » pour occuper une ligne Nord-Ouest-Sud-Est, d’Allemant, au Nord de Laffaux, à Chavonne, sur l’Aisne. Le 28, elle avait atteint une seconde ligne à peu près parallèle, mais plus rapprochée de Soissons, de Neuville-sur-Margival à Vregny. Le 29, elle enserrait à l’étrangler la ville dont elle tenait les lisières