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méconnaître sans crime, et qui ont dicté au président des États-Unis, après ses éloquentes protestations contre les attentats commis par l’Allemagne en violation du droit des gens, le message du 2 avril 1917, par, lequel il déclarait inévitable, pour ses concitoyens et pour lui, l’obligation morale d’accepter la guerre et de s’y préparer. « Le droit, disait-il, est plus précieux que la paix… Le jour est venu où l’Amérique a le privilège de donner son sang et sa force pour les principes auxquels elle doit son existence… Dieu l’aidant, elle ne peut pas agir autrement. »

À cette conclusion de l’examen de conscience d’un grand peuple qui avait compris son destin et d’un grand homme d’État qui avait mesuré ses responsabilités, succéda rapidement la proclamation du 6 avril 1917, conforme à la décision du Sénat et de la Chambre des représentants : « En conséquence, moi, Woodrow Wilson, président des États-Unis, je proclame par la présente, à tous ceux qu’il appartiendra, que l’état de guerre existe entre les États-Unis et le gouvernement impérial allemand. » La loi militaire des États-Unis prévoit, en cas de guerre, l’appel de 500 000 hommes au moins. Le président Wilson indiqua, tout de suite, que ce chiffre devait être largement dépassé. Il se prononça, ainsi que le général Pershing, pour le principe du service militaire obligatoire. Conformément à la loi votée par le Congrès et approuvée le 18 mai 1917, tous les Américains en âge et en état de porter les armes furent invités à se présenter, le 5 juin, entre le lever et le coucher du soleil, devant des commissions locales, instituées au nombre de 4 000 et chargées d’établir la liste des conscrits mobilisables. En quarante-huit heures cette liste fut centralisée à Washington. Elle comprenait environ dix millions de citoyens aptes à servir.

Sur ces énormes disponibilités on décida de prélever d’abord, par un appel au choix, les hommes dont l’incorporation, selon la lettre et l’esprit de la loi, « comportait le moindre préjudice pour les intérêts industriels, agricoles et domestiques de la nation. » Cette première levée donna un contingent d’un million cinq cent mille hommes, aussitôt répartis dans des camps et cantonnements organisés avec autant de méthode que de rapidité. Les camps d’entraînement (training camps) et les centres d’instruction furent multipliés sur toute l’étendue des vastes territoires dont disposent les États-Unis. Le camp Upton, dans l’État de New-York, le camp Gordon en Géorgie, le camp