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Et les plaintes des sirènes,
Et les lointains feux roulants
Annonçaient aux nuits sereines
L’approche des hommes volants.



La mer roulait sa houle ainsi qu’aux anciens jours,
Quand Noé vit venir la colombe vers l’Arche...

Cependant les bateaux dissimulaient leur marche
Et changeaient leur parcours.
La torpille éclatait, le nageur sur la vague
Demeurait sans secours.
Dans la brume émergeait la longue forme vague
D’un monstre ruisselant.
Des hommes quelquefois ricanaient sur sa croupe.
Et, lorsque l’éperon renversait la chaloupe,
Le seul témoin du crime était le goéland.



Et depuis quatre années
La charrue et la herse,
Par les champs, sous l’averse,
Gisent, abandonnées.

La terre jadis brune
Est pareille au talus.
L’antique soc n’a plus
La couleur de la lune.

Mais ferraille et broussaille,
Nuages pluvieux,
Tout est même grisaille.

Le corbeau qui vit vieux
Vole d’une aile lasse,
Et, sans cesse, à ce deuil
De ce qui fut orgueil
Jette une injure basse.