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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 51.djvu/693

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REVUE LITTÉRAIRE

UN RENOUVEAU DU ROMAN ROMANESQUE[1]

M. Paul Bourget, dans la préface qu’il a donnée au roman de M. Gérard Bauër, Sous les mers, écrit : « Il y a là du mouvement, de la force, une belle tenue de style, et surtout ce que j’ai apprécié très particulièrement : de l’imagination. L’imagination ! C’est la faculté maîtresse du romancier, ou plutôt ce devrait l’être… » On a pris l’habitude, — et l’habitude est si reposante ! — de considérer M. Paul Bourget comme un psychologue et puis comme un moraliste catholique : alors, on s’étonne de le voir déclarer l’imagination « la faculté maîtresse du romancier ; » pour s’étonner plus commodément, on oublie toute la gaieté d’imagination qu’il y a dans ses derniers romans, par exemple, et dans Némésis. Le roman, dit-il, est un genre littéraire extrêmement souple ; et certes on ne finirait pas de compter les variétés de ce genre qui sont nées depuis un demi-siècle, chez nous. Cependant un genre littéraire, et même libre, a ses règles ou, du moins, car ce mot n’est plus à la mode, ses « conditions » qu’il ne saurait méconnaître sans se dénaturer. Ainsi, la poésie ne se passe point d’émotion ; le roman, d’imagination. Voici deux romans : les Trois Mousquetaires et Bouvard et Pécuchet. Dans son roman, Flaubert a « dressé une encyclopédie de la sottise instruite et, en réduisant au minimum l’intrigue, les incidents, les passions, enfin toute la partie imaginative, » il a « failli dénaturer l’art du roman. » Les Trois Mousquetaires du « génial » Dumas, c’est « une prose enlevée à la va-vite ; les caractères sont à peine schématisés ;

  1. Sous les mers, par Gérard Bauër, préface de Paul Bourget (l’Édition française illustrée) ; — Kœnigsmark, par Pierre Benoit (Emile-Paul) ; du même auteur, l’Atlandide (Albin Michel).