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de vider la poche entre Somme et Oise. C’était donc avec une anxiété passionnée qu’il comptait les heures : « Notre attaque de la 10e armée, sur un front de 20 kilomètres, écrivait-il à Haig le 20 au soir, se poursuit aujourd’hui dans des conditions avantageuses, avec douze divisions dont deux seulement avaient été au préalable mises au repos. C’est vous dire que l’ennemi est partout ébranlé par les coups qu’il a déjà reçus, que nous devons répéter ces coups sans perdre de temps et y consacrer toutes les divisions susceptibles d’intervenir sans retard. Je compte donc que l’attaque de votre 3e armée, déjà remise au 21, va partir ce jour-là avec violence, entraînera les divisions voisines de la 1re armée et l’ensemble de votre 4e armée. »

Cette fois, il était inutile de talonner le maréchal Haig. L’État-major britannique qui, à son ordinaire, avait travaillé à préparer cette opération à la manière d’une belle partie d’échecs, était bien résolu à partir à temps pour qu’à peine battu entre Aisne et Oise, l’ennemi le fût entre Scarpe et Somme, et dès lors l’armée britannique victorieuse ne s’arrêterait plus.

A 4 heures 55, le 21, les 4e et 6e corps de sir Julian Bynt attaquaient sur le front prévu au Nord de l’Ancre, entre Miraumont et Moyenneville.

Appuyées par des tanks, les troupes enlevèrent sans difficultés les avancées de l’ennemi ; d’autres troupes, les dépassant alors, suivant la tactique arrêtée, continuèrent cette brillante progression. Après une lutte très vive, notamment au abords d’Achiet-le-Grand et du Bois Logeast, elles atteignirent la ligne de chemin de fer, donnée, on s’en souvient, comme objectif à cette attaque préparatoire, ayant fait 2 000 prisonniers et mérité l’admiration de tous ceux qui avaient pu voir ces magnifiques troupes réaliser le plan conçu, comme en une arène de foot-ball.

Le lendemain, toujours suivant le plan arrêté, la gauche de l’armée Rawlinson (3e corps) attaqua, plus au Sud, le front entre Albert et Bray ; forçant le passage de l’Ancre, le 3e corps comme entrée de jeu, enlevait Albert et portait la ligne entre Ancre et Somme à l’Est de la route de Bray à Albert, raflant son tour 2 400 prisonniers.

Foch avait couru à Mouchy-le-Châtel, tout bouillant de joie et d’impatience, et y avait rencontré le maréchal Haig. Il se put