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qui jonchaient, avec des monceaux de cadavres allemands, cette terre désolée. Le sang avait coulé à flots, mais l’orgueil allemand, surtout, saignait par tous les pores. Après la défaite du 18 juillet, nos ennemis avaient pu penser se refaire, préparer une revanche à échéance plus ou moins courte. Après l’énorme défaite d’entre Scarpe et Oise, le Haut Commandement allemand ne pouvait plus espérer que sauver ses armées désemparées. Encore ne comptait-il, pour y arriver, que sur le rempart formidable élevé en 1917 et derrière lequel il se réfugiait. Il le tenait pour « imprenable. » Imprenable, peut être l’eût-il été, défendu par l’armée allemande du printemps de 1918, parce que le meilleur rempart n’est point fait seulement de levées de terre, de blockhaus cimentés, et de fils de fer, mais de cœurs résolus, pleins de confiance et de fierté. Mais confiance et fierté, tout était maintenant du côté de l’assaillant. Et c’était le résultat le plus beau, le plus sûr, le plus fécond de ces cinq semaines de combats magnifiques.

Et l’on allait, ainsi que le chantaient les patriotes de l’an I de la République, chercher « les tyrans jusque dans leurs repaires. »


LOUIS MADELIN.