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Les gendarmes ont rapporté que « le général Malet, se rendant au lieu de l’exécution, était en voiture avec Bocchciampe, prisonnier d’Etat ; il dit à ce dernier que leur mort serait vengée par des hommes plus heureux qui, en donnant la liberté à leur patrie, triompheraient dans leur entreprise, et, que, dans six mois, il y aurait un nouvel état de choses ; à quoi Boccheiampe répondit : « Je ne suis coupable que d’avoir exécuté vos ordres. » Ce fut tout.

En sortant de la barrière de Grenelle, à gauche, les fiacres et leur escorte pénétrèrent dans le carré formé d’un côté par le mur d’enceinte, des trois autres, par des troupes de la garnison. Aucun incident ne se produisit, il n’y eut ni discours prononcé par Malet, ni maniement d’armes commandé par lui. « La gendarmerie me rend compte, écrit au ministre de la Guerre le maréchal duc de Conegliano, qu’avant et après l’exécution, la multitude n’a cessé de manifester son indignation contre les coupables et que, de toutes parts, des cris de : vive l’Empereur, se sont fait entendre. J’avais sur le terrain des officiers de confiance, qui m’ont confirmé ces particularités. »

Le général de division, commandant provisoire de la 1re division militaire de la place de Paris, baron M. Fririon, écrit simplement au ministre de la Police générale : « J’ai l’honneur de prévenir Votre Excellence que des quatorze coupables, douze ont été fusillés, Rabbe et Rateau ayant obtenu un sursis. » Si un incident s’était produit, Moncey et Fririon n’eussent pas manqué d’en faire mention. Le chirurgien-major Lacroix, des dragons de la Garde de Paris, qui visita un à un les hommes exécutés, constata que Guidal était mort le dernier, ce qui supprime une dernière légende.


Malet a emporté son secret, en admettant qu’il eût un secret. Il eût sans doute cherché à utiliser pour servir son ambition, aussi bien les éléments royalistes que les républicains, ce qui a permis par la suite à chacun des deux partis de le revendiquer. Qu’il eût eu des relations en 1808 avec ceux-ci, en 1812 avec ceux-là, nul doute, mais il était bien trop ambitieux pour s’attacher à un parti. Son but, tel qu’il résulte aussi bien des documents de 1808 que de ceux de 1812, était de se procurer une dictature qu’il eût exercée seul ou entouré de comparses qui