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Il savait toutes « les raisons de croire, » d’espérer, et nous les donnait toutes. Hallays patriote, Hallays combattant à sa manière, je réservais pour la fin ce trait de sa physionomie, n’en trouvant pas un autre qui l’achève mieux et l’honore davantage. S’il est vrai que la victoire de nos armes soit le triomphe de l’esprit sur la matière, il n’est pas moins certain que l’esprit d’un André Hallays et de ceux qui lui ressemblent n’y a point été étranger.

Cet esprit et ce cœur, c’est la guerre qui les a révélés tout entiers. Il semblé qu’elle les ait, l’un et l’autre, comment dirais-je, détendus et largement épanouis. M. Hallays parle-t-il aujourd’hui des mêmes choses dont il parlait hier, il le fait d’une autre voix et sur un mode nouveau. Dans ses discours et jusque dans ses intimes causeries, il arrive alors qu’on surprenne des échappées et comme des jours entr’ouverts sur des horizons, vers des hauteurs mystérieuses où le portaient plus rarement ses goûts et ses désirs d’autrefois. Sceptique, disaient alors quelques-uns de ceux qui s’imaginaient le bien connaître. Leur était-il assez mal connu ! Qu’ils apprennent seulement, ceux-là, comment ce croyant au passé, à tout le passé de notre France croit aussi à son avenir : « J’ai assisté à l’inauguration de l’Université de Strasbourg. Ce fut un chef-d’œuvre. Les étrangers très nombreux qui sont venus ici en criaient d’admiration. Le cadre était prodigieux. La salle, — une ignominie boche, — disparaissait sous les tapisseries de l’histoire du Roi et des tentures d’un goût magnifique et exquis. Les toges des professeurs, les uniformes des soldats, les bannières et les drapeaux formaient un tableau d’une harmonie incomparable. Des harangues nobles et décentes. De l’ordre, de la dignité, un air de victoire sans forfanterie ; l’hommage déférent de vingt nations à la France ; et, pour tout dramatiser, le sentiment, dans les paroles et dans les gestes, que la guerre continue. Et à Strasbourg ! Et devant les trois maréchaux ! Puis, devant cette Université où venait de se dérouler cette cérémonie grave et lourde de sens, ce fut le défilé de nos jeunes troupes, qui marchent, elles aussi, à l’allure poilue. Enfin, — explosion d’allégresse populaire, — le cortège des corporations avec leurs musiques, leurs bannières et les flots de petites Alsaciennes dansant et saluant. Quand on a vu cela, je vous assure qu’il est impossible de douter de l’avenir. »