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Dès l’année 1900, les vieilles querelles ayant été liquidées et les anciens malentendus dissipés, effacés en France les souvenirs déplaisants de la politique de- Crispi, apaisée en Italie la mauvaise humeur née de notre installation en Tunisie, des rapports amicaux établis, une convention commerciale conclue dont M. Luigi Luzzatti fut l’éminent négociateur, les deux gouvernements avaient senti le moment venu de passer à des arrangements positifs portant sur leurs intérêts politiques. Les 14 et 16 décembre 1900, le premier de ces arrangements était intervenu, sous la forme d’un échange de lettres officielles entre le marquis Visconti-Venosta, ministre des Affaires étrangères d’Italie, et notre ambassadeur à Rome, M. Barrère. Terminant et concluant des conversations engagées sur la situation présente et à venir dans la Méditerranée, les lettres échangées entre ces doux illustres diplomates concernaient d’une part la Tripolitaine et la Cyrénaïque, d’autre part le Maroc. Le gouvernement français, qui venait de signer, l’année précédente, une convention africaine avec l’Angleterre et s’en était expliqué verbalement avec le gouvernement italien, lui réitérait ces explications par écrit et lui renouvelait l’assurance formelle de son désintéressement politique par rapport à la Tripolitaine et à la Cyrénaïque. Il déclarait n’avoir pas l’intention de dépasser la limite fixée à son influence par la convention franco-anglaise de 1899, qui avait laissé en dehors de sa zone le territoire formant alors le vilayet ottoman de Tripoli. Réciproquement, le gouvernement italien reconnaissait que l’action de la France au Maroc, telle qu’elle lui avait été définie dans les entretiens préalables à l’échange de lettres, ne portait aucune atteinte aux intérêts de l’Italie comme puissance méditerranéenne ; il.posait ce principe, admis par le gouvernement français, que, si quelque modification à l’état politique ou territorial du Maroc venait à résulter de l’action marocaine de la France, le droit s’ensuivrait pour lui-même de développer son influence en Tripolitaine et en Cyrénaïque.

Deux ans après avoir ainsi mis d’accord leurs intérêts méditerranéens les plus essentiels, les deux Gouvernements dont les rapports s’étaient resserrés avaient été à même de porter leur entente et leurs arrangements, du domaine de la politique coloniale à celui de la politique européenne