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routinier de l’Angleterre et, avec une verdeur d’expression dont il faut lui laisser la responsabilité, il s’écrie un peu plus loin : « Notre stupide (sic) nation ne croit ni au moteur à combustion interne, ni aux huiles lourdes. Je crois, moi, que ces deux éléments nouveaux vont révolutionner non seulement la guerre sur mer, mais encore le commerce maritime… Cependant, tout au début, je n’orienterais pas les constructions navales de l’Etat vers l’unité de combat à, moteur au pétrole. Je ferais construire plutôt des navires de charge destinés à porterie combustible liquide et je les munirais du moteur à combustion interne : experientia docet… On ne peut songer à avoir, du premier coup, le moteur de ce type idéal et nous devons faire porter notre activité d’abord sur la production de navires peu coûteux, qui seraient, en définitive, des coques à expériences pour moteurs à combustion interne. »

Voilà des conseils à retenir. Il n’est que temps, en effet, de faire sortir le moteur en question du sous-marin, où il semble qu’on le veuille ensevelir, pour l’adapter définitivement au service des grands bâtiments de surface, au double et considérable bénéfice des économies d’argent et de personnel. Qu’il soit nécessaire, pour cela, de faire des essais méthodiques, de tâtonner un peu, nul doute. Mais il n’est pas douteux non plus que nous arrivions, si nous le voulons énergiquement, à vaincre les difficultés qui nous ont arrêtés jusqu’ici. L’essor que va prendre notre métallurgie doit nous donner la certitude que nous saurons, nous aussi, faire des cylindres à grand alésage et des pistons en fonte impeccable, comme ceux que l’on produit à Augsbourg-Nuremberg, à Stockholm, à Christiania, et qui supportent longtemps, sans la moindre altération, — sans fuite, par conséquent, — les 1 000 degrés que développe la combustion du mazout dans ces appareils.

Et en terminant son pittoresque exposé dans la quatrième de ses six lettres au Times, l’amiral Fisher jette un regard aigu et probablement révélateur sur le proche avenir.

Comme quelques marins français, comme beaucoup de marins anglais[1]qui ont su s’instruire aux leçons de la guerre, il a compris qu’il fallait beaucoup attendre, — beaucoup craindre, en même temps, — de l’arme aérienne ; mais,

  1. On sait que la marine anglaise travaille particulièrement, en ce moment la question des grands dirigeables. Elle ne néglige d’ailleurs pas les hydravions.