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comment finit la guerre.

frondeurs, en même temps que très suffisamment disciplinés et on se répétait un propos attribué à une personnalité militaire : « En 1915 nous avons marché comme des enfants, en 1916 comme des vieillards ; il faut enfin marcher comme des hommes. » Ces propos et d’autres plus légers, qui n’étaient point négligeables et qui se répétaient un peu partout, s’aggravaient du chiffre des pertes, qu’on exagérait d’ailleurs, et qui paraissait démontrer que l’action menée par les procédés qualifiés de scientifiques était encore plus coûteuse que les attaques de l’année précédente, jugées inconsidérées. En fait, l’offensive de la Somme coûtait en cinq mois sensiblement moins que celle de Champagne en deux semaines, et le commandement français avait grandement profité de l’expérience. On lui reprochait de ne pas assez tenir compte des leçons de la guerre nouvelle, et bien au contraire, le défaut que les événements paraissaient faire constater chez lui, c’est de tomber dans l’empirisme et de varier trop vite ses méthodes en attribuant trop de valeur aux résultats immédiats.


L’échec de Verdun avait fait disgracier le général von Falkenhayn qui, le 29 août 1916, avait été remplacé par le maréchal Hindenburg dans son poste de chef d’État-Major général des armées allemandes avec le général Ludendorff comme premier Quartier Maître général.

La bataille de la Somme avait été parfaitement appréciée en Angleterre ; l’armée anglaise avait subi de lourdes pertes et sa progression était plus lente dans l’ensemble que celle de l’armée française, mais ce n’est pas la topographie qui permet de déterminer la valeur respective en pareil cas et les comparaisons étaient oiseuses ; sir Douglas Haig avait compris, utilise et développé les magnifiques qualités de ténacité que possédaient ses troupes. Il fut très justement élevé à la dignité de Field Marshall, la plus haute du Royaume Uni.

En France, l’opinion publique, souveraine maîtresse, se réduisait, par suite des nécessités de la censure, au milieu parlementaire, dont le Gouvernement dépendait immédiatement. Or le Parlement ne disposait que de renseignements fragmentaires, qui ne lui permettaient pas de se rendre compte du rôle du commandement dans les opérations. On exagérait