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domaine colonial ? Comment ne pas lui assurer vivres et matières premières ? »

En attendant, il faut signer. Et la Gazette de Francfort estime qu’il ne faut pas arrêter par un refus absolu l’évolution de l’Allemagne vers un avenir meilleur. « Car il faut montrer que l’Allemagne a tout fait pour avoir la paix, pour chercher une voie nouvelle par des moyens nouveaux. Cette attitude a, dans le monde, une grande puissance d’attraction. Ne l’oublions pas. »

Tel est donc l’esprit du socialisme majoritaire et des démocrates au moment de cette crise de l’opinion qui a dévoilé la véritable orientation de la Révolution allemande. Au lendemain de la signature, cet esprit se manifeste avec plus de netteté que jamais. « Les peuples, écrivait le Vorwärts des 27 et 28 juin, nous donnent la main dans la lutte universelle contre le capitalisme mondial. Donnons au socialisme la victoire dans les pays de l’Entente. Nous aurons alors la Ligue des Peuples socialistes qui embrassera le monde entier. » Le même journal ajoutera, le 1er juillet :


L’Allemagne est indispensable au monde, qui a besoin de sa capacité d’organisation sociale et syndicale. Malgré le 28 juin 1919, la mission universelle de l’Allemagne subsiste. Elle ne fait même que commencer. Nous n’avons plus besoin de la guerre. Dans le monde entier, se groupent maintenant autour de l’Allemagne tous ceux qui veulent le droit et la justice. Foin des canons et des sous-marins ! Notre prestige moral a grandi. Nous avons la sympathie des neutres et de tous ceux qui, en France et en Angleterre, en Italie et en Amérique, luttent contre le militarisme et le capitalisme. Voilà une alliance qui vaut mieux que l’ancienne Triplice ou l’Entente elle-même. Nous aurons notre revanche. Une fois de plus, c’est l’Allemagne qui sauvera et régénérera le monde.


Quant aux démocrates, ils préconisent plus que jamais une politique moyenne entre l’extrême gauche et l’extrême droite, ce qu’on est convenu d’appeler « la dictature du milieu. » Encore quelques années, disent-ils, et le monde comprendra que l’Allemagne a été purifiée, non humiliée par la paix de Versailles. Sur les ruines de l’Entente actuelle, s’élèvera la vraie Société des Nations, dont l’Allemagne aura eu la gloire de comprendre la première la vraie nature et la vraie portée.