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conventions communes, que, de toutes parts, nous sommes environnés de dangers menaçants. L’Allemagne met soigneusement à profit l’indulgent répit que lui a laissé la conférence de Spa. La Commission allemande de Prusse occidentale recrute avec zèle, dans des communes riveraines de la Vistule, de prétendues protestations contre leur réunion à la Pologne; elle déclare qu’il est d’une nécessité vitale de confier l’entretien des digues à une seule nation et d’assurer à la Prusse l’accès permanent du fleuve. La presse allemande se fâche parce que le Gouvernement d’Oppjeln a autorisé l’enseignement de la langue polonaise dans les écoles de Haute-Silésie. Le Gouvernement allemand se plaint à la Conférence de la paix des procédés qu’auraient employés les Belges, avant et pendant le plébiscite, à Eupen et à Malmédy. Nous trouvons, en Cilicie, des officiers allemands dans les troupes kémalistes que nous faisons prisonnières. Les étudiants forment des corps francs, armés de fusils, dans toutes les universités allemandes. Les socialistes majoritaires du Reichstag reprochent au Congrès socialiste international d’avoir reconnu, que l’Allemagne était responsable de la guerre. Dans le territoire d’Allenstein, l’Allemagne place effrontément les Alliés devant un fait accompli; elle donne à son commissaire la liberté d’envoyer à la frontière des unités de la Reichswehr. Les pangermanistes suscitent, dans la Sarre, la grève des services publics. Bref, nos anciens ennemis poursuivent systématiquement leur dessein d’émietter le traité de Versailles et d’y substituer un état de fait qui ne sera plus ni la guerre ni la paix. Déjà, souffle çà et là l’esprit de revanche et, dans les rues des grandes villes, étudiants et soldats de la Reichswehr entonnent, à gorge déployée, le Deutschland über Alles.

C’est le moment que choisissent quelques journaux anglais pour féliciter M. Lloyd George de conduire, de gré ou de force, les Alliés au seuil d’une nouvelle conférence internationale, ou plutôt d’un Congres général de l’Europe, où siégeraient, bien entendu, les Soviets et l’Allemagne et où serait, une bonne fois pour toutes, remise en question toute l’œuvre de Versailles. Tel est depuis longtemps, assurent ces journaux, le plan du premier ministre britannique, et il en poursuit la réalisation avec une opiniâtreté qui, sous une broderie d’apparentes fantaisies, forme une trame très résistante. Nous ne savons ce qu’il y a d’exact dans cette interprétation des volontés de M. Lloyd George. Mais il est certain, d’une part, que depuis l’invitation à Prinkipo, il n’a pas varié dans son idée d’engager la