LA FILLE D’ÉLÉAZAR[1]
DEUXIÈME PARTIE[2]
VIII
Trois mois ont passé. Pleurons sur les cœurs de qui ils ont passé… Jacob s’est mis vaillamment au travail. Malgré la physionomie étrangère du séminaire Rothschild et de ses nouveaux maîtres, malgré le chagrin qui par moments étrangle son souffle, il peine avec assiduité, avec entrain même. N’ayant point de nouvelles de Debourah, il nourrit de plus en plus l’espoir de revenir à temps pour en faire sa femme. Il a déjà conquis l’estime de tous ces rabbins de France. Parfois, il les a entendus qui chuchotaient entre eux, en le désignant du regard : « Voilà un garçon intelligent, qui réussira. » Aussi bien, durant ces trois mois de Paris, sous un hiver rigoureux, Jacob avait pris part à toutes les séances du Madrach, de même qu’il n’avait point manqué une prière à la synagogue.
Il avait trouvé ce monde juif parisien un peu factice. Partout l’esprit d’imitation, de contrefaçon des mœurs, françaises et catholiques, qui sévissait déjà dans Alger !
La synagogue aussi l’avait bien un peu choqué. Il s’y était rendu la première fois un samedi. L’office ne commençait pas encore. Aussitôt qu’il avait franchi la petite grille ouvrant sur la rue de la Victoire, il avait eu l’impression qu’il pénétrait dans une cathédrale. Cette salle immense, au plafond en voûte,