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aux dépens de nos amis et alliés roumains, tchéco-slovaques et yougo-slaves, le centre d’attraction économique et politique de tout le bassin moyen du Danube. Quand il s’est agi de désigner le lieu où siégerait la nouvelle commission du Danube, — l’ancienne siégeait à Galatz, — la Conférence hésitait entre trois villes alliées : une ville roumaine, Belgrade ou le port tchèque de Presbourg. Les Anglais insistèrent pour Budapest. La question n’est pas encore tranchée.

A Vienne, comme à Budapest, les représentants militaires et civils de l’Angleterre ont suivi avec scepticisme les efforts de la France pour faire vivre une petite Autriche indépendante et une Hongrie dégagée de l’influence allemande ; ils paraissaient moins préoccupés de prévenir une nouvelle poussée du germanisme dans le bassin du Danube, ou de consolider les nouveaux États nés de la victoire de l’Entente, que d’assurer à leur pays une clientèle politique et commerciale ; ils ne décourageaient ni les réclamations des Allemands de Bohême, ni les menées des Magyars en Slovaquie et en Transylvanie. S’ils favorisent la reprise des échanges entre les nouveaux États issus de la dislocation de l’Empire dualiste, c’est dans un intérêt avant tout commercial, et c’est en s’associant aux Allemands et aux Magyars qu’ils travaillent à développer leurs affaires dans le bassin du Danube. Un trust anglais, soutenu par les principales banques, s’est constitué à cet effet. La navigation intérieure attire d’abord son attention. Les traités de Saint-Germain et de Trianon obligent l’Autriche et la Hongrie à céder aux vainqueurs une partie de leur batellerie fluviale dans une proportion qui sera déterminée par l’arbitrage des États-Unis. Le trust anglais n’attend pas cette échéance ; il négocie avec la « Société sud-allemande de navigation à vapeur » l’achat, moyennant 63 000 livres sterling, de toutes ses installations à Vienne, Budapest, Linz, Ratisbonne ; trois autres Compagnies sont devenues la propriété du syndicat britannique ou sont contrôlées par lui. Ainsi se révèle un grand dessein d’expansion commerciale par la navigation intérieure.


Le Danube, par les canaux, nous ramène au Rhin. Nous avons achevé ainsi le tour des côtes d’Europe, avec leurs ports, leurs détroits, leurs grands fleuves. Au terme de ce périple, nous craignons d’avoir donné, par l’accumulation des faits et l’analyse