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pas tenu à moi que je n’eusse plus tôt ce bonheur et vous ne pouvez pas ignorer que c’est à Padoue même, au moment où je me disposais à partir, que l’ordre de ne pas passer outre m’a été signifié. Cet ordre, qui porte la date du 28 août, n’a pas été révoqué depuis. Je n’ai pas vu M. de Milanges. C’est il y a quelques jours seulement que le gouverneur de Venise m’a fait connaître que je pouvais aller jusqu’à Laybach. Toutefois, ce n’est pas le moment de vous entretenir de ces détails si pénibles pour moi. Mon seul vœu maintenant est de vous rejoindre et j’irai aussi vite que ma santé qui n’est pas trop bonne me le permettra. Je compte partir aujourd’hui même et je passerai par Laybach et Klagenfurt Croyez bien, mon cher Père, à ma vive impatience de vous embrasser et de vous témoigner de vive voix mon respect et ma tendresse.

« Votre très affectionnée et obéissante fille,

« Signé : CAROLINE. »


Au reçu de cette lettre, le Roi m’a prié de lui faire un rapport sur ce qu’il doit demander à la Duchesse de Berry. Je me mis aussitôt à l’œuvre et voici la substance de mon travail.

Quand le Roi m’a envoyé à la rencontre de Mme la Duchesse de Berry, il mettait deux conditions au retour de Son Altesse Royale, — la première, que l’acte du mariage secret de cette princesse avec le comte Lucchesi lui serait communiqué dans les formes garantissant l’union légale des deux époux et la légitimité de leurs enfants, de manière à rendre impossible pour l’avenir toute discussion sur ce point.

J’ai rendu compte au Roi des déclarations que me fît Son Altesse Royale sur son mariage dont elle me donna à connaître l’acte en même temps que les archives où il était déposé. Je crus alors agir suivant les intentions de Sa Majesté en abandonnant la proposition de verser ce titre à la chancellerie de cour et d’Etat de l’Empereur. D’autre part, je demandai à la princesse l’autorisation de me rendre à Rome auprès du cardinal Zurla, vicaire d’Etat de Sa Sainteté, pour réclamer de lui un certificat constatant le dépôt de l’acte dans ses archives et sa régularité légale. Mme la Duchesse de Berry consentit à cette offre, et, au moyen d’une procuration signée d’elle et de M. le comte de Lucchesi, j’ai facilement obtenu du cardinal la confirmation verbale et détaillée du mariage secret de Son Altesse Royale et