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coquette Madeleine est tenu par Messire Maisnard, prêtre et chanoine de Saint-Germain-des-Prés à Paris, tandis que celui des suivantes Pérusine et Pasiphée est confié à deux jeunes gens, Leclercq et Lossignot.

Le nombre des ecclésiastiques et des moines acteurs est considérable, et il ne faudrait pas croire qu’ils se réservassent le personnage de Dieu (effectivement confié à sire Jehan de Brouxelles, prêtre), ceux de Jésus, du Saint-Esprit et des Apôtres. Caïn est Godefroy de Bertaimont ; le roi Hérode est le frère Bernardin ; Belzébuth, Jehan, clerc de l’église Sainte-Waudru… mais il faut dire que c’est avant la chute. Je ne connais pas la profession d’Étienne du Ponceau, qui fait Satan, mais je sais au moins qu’il porte le titre de Maistre.

D’ailleurs, sur le hourd, toutes les classes sont mêlées, du prêtre et du noble à l’artisan, en passant par le bourgeois et l’artiste. C’est que le concours bénévole de tous n’est pas inutile pour remplir les quelques centaines de rôles de la Passion. Quelques-uns, comme ceux des anges révoltés devenant des démons, ou comme celui de Lucifer devenant le serpent, devaient être dédoublés. De même, celui de certains personnages qui, selon la formule de Boileau, « enfants au premier acte, sont barbons au dernier. » Ainsi de Notre-Dame, présentée d’abord, sous forme de poupée sans doute, comme Marie nouvellement née, puis, se doit musser Marie nouvellement née et paroir celle de sept ans ; ensuite, soit ici avertie Marie à quatorze ans de se trouver dessous le Temple, et absconser [cacher] celle à sept ans. Substitution pareille pour Jésus : après dîner, Jésus à douze ans sera absconsé et Jésus à trente ans apparaîtra. Cependant le cas est rare, et ne concerne que les protagonistes : le plus souvent, c’est l’inverse qui se produit, et, l’on peut confier à un seul acteur plusieurs personnages qui ne réapparaissent pas ensemble ; c’est ce qu’on a fait pour Mlle Waudru.

On utilise aussi les personnages sans parler, nous dirions les figurants, ou encore les poupées, comme l’enfant fustif [en bois], dont il est question au Massacre des Innocents, ou comme l’âme d’Hérode, que les diables emportent en Enfer, laissant le corps sur le carreau. Les animaux ne manquent pas non plus, et ils sont bien vivants, puisque le massard ou trésorier déclare avoir assuré la pâture de l’âne et du bœuf, et qu’on a donné à Jehan Foucquart dit Docque-docque, pour la nourriture de