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exotique ; pas d’esclaves, donc pas de nègres ; et aujourd’hui, pas de Chinois, et seulement quelques rares Japonais. D’autre part, l’éloignement a écarté les grands mouvements d’émigration ; l’Espagne a envoyé vingt mille nationaux ; les Etats voisins de l’Amérique latine à peu près autant, mais ces apports n’altèrent en rien le fond de la race. La France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne et l’Italie ont envoyé environ 10 000 nationaux chacune ; l’Autriche et la Suisse quelques milliers à peine. Tous ces émigrants ont reçu un très bon accueil ; ils se louent de l’hospitalité du Chili, qui leur est reconnaissant de leur sage conduite, de leur travail et des capitaux apportés pour la mise en valeur du pays. Ils pourraient être beaucoup plus nombreux sans le moindre inconvénient, et le Gouvernement favorise leur arrivée dans toute la mesure du possible. Il reste dans le Chili méridional de vastes espaces libres, à peu près incultes, où le climat essentiellement tempéré est très favorable au développement d’une importante colonisation européenne.


3-5 septembre. — A travers de riantes campagnes, nous arrivons à Santiago, dont la population approche de 500 000 âmes. Couronnée de ses neiges éternelles, la barrière des Andes domine la capitale, et c’est là un fond de tableau unique au monde.

C’est une foule compacte et très démonstrative qui nous reçoit à la gare. Les cris de « Vive la France ! » retentissent de toutes parts. Nous traversons la belle avenue de l’Alemada, plantée de quatre rangées d’arbres, où les statues des grands hommes chiliens font une sorte de Panthéon national. Au cercle français, nous apportons à nos compatriotes le salut de la patrie lointaine. Dans l’après-midi, je me rends à l’audience du Président de la République, don Arturo Alessandri. Il m’entretient de mon voyage et de l’état de la France ; mais la conversation dévie rapidement. Nous parlons longuement du Dr Gustave Le Bon, dont le Président est comme moi un grand admirateur ; il affirme que la Psychologie des Foules trouve son application sous toutes les latitudes, et qu’il doit ses succès politiques aux principes mis en lumière par notre savant philosophe, et il veut bien me charger de lui témoigner son admiration et sa reconnaissance.