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remparts… » Les Arabes attribuèrent la chute d’une telle place à l’assistance des anges Gabriel, Mikael, Azrael et Israël…

Il y a bien de la rhétorique dans tout cela, or je me suis juré de ne rien consigner dans cette « enquête » qui ne soit de mon expérience personnelle. Que n’ai-je pu causer avec les Adra ! C’est une famille, aujourd’hui fixée à Tripoli, à qui cette forteresse a appartenu en dernier lieu. J’aurais voulu aussi interroger les braves gens dont j’ai vu, en gravissant jusqu’à la forteresse, qu’ils pratiquent le culte des arbres. Ces beaux figuiers, couverts de chiffons et d’ex-votos de toute sorte, on m’assure que c’est le fait des Metualis. Je donnerais toute vaine évocation du passé de cet éclatant manoir, pour une bonne causerie avec ces Metualis sur l’idée qu’ils se font aujourd’hui du culte des arbres. Un culte tellement sympathique !

De retour à Banias, nous avons diné en plein air, auprès de nos tentes, avec les notables et le Caïmakan. Indéfiniment la conversation s’est prolongée sur mes Ismaéliens et sur Mohammed Shah, tandis que j’entendais courir le ruisseau dans la nuit.


DE BANIAS À KHAWABl

Au matin, à huit heures, départ de Banias pour Khawabi. Nous suivons la mer, par des sentiers faciles, au pied du château de Marqab. La chaleur, déjà remarquable, grandit terriblement, lorsque, pour éviter les sinuosités du rivage, nous coupons au court, à travers des terres volcaniques où la brise marine cesse de nous rafraîchir.

Vers onze heures, nous atteignons la halte du déjeuner, les jardins du pont Kharab : quelques arbres, auprès d’une source et d’un champ de blé. Un beau figuier met son ombre sur nos tapis étendus. C’est un figuier non greffé, mais on y fait grimper un petit enfant qui sait choisir les fruits. Sous les arbres voisins, les chevaux remuent leurs grandes queues pour chasser les mouches. Avec eux sont assis les gendarmes et les Moukres. À mesure que chacun de nous s’est servi, on leur passe les plats de poulet, de légumes froids et de laitage, tout un charmant festin qu’a voulu nous offrir la famille d’Abdallah Elias.

Dans les arbres, un oiseau, d’autant de cœur qu’un rossignol, chante à demi endormi. Un âne brait au loin.

Pas de sieste. En route. Nous traversons une rivière où il y